Dès 1978, soit un an avant le premier album de Trust, Shakin’ Street avait sorti "Vampire Rock". C’est dire si ce groupe, qui a compris dans ses rangs les deux futurs Telephone, Louis Bertignac et Corinne Marienneau, fait partie des précurseurs de la scène métal française. Après avoir effectué les premières parties de d’AC/DC, de Blue Oÿster Cult et de Black Sabbath, le groupe s’adjoint les services de Ross The Boss, futur Manowar et ex The Dictators, et s’envole pour les USA enregistrer son second opus. Aidé par le producteur Sandy Pearlman (Producteur et inventeur du nom du B.O.C., et producteur de The Dictators), le groupe nous propose neuf nouveaux titres au potentiel international.
Les atouts de Shakin’ Street , sont légions. Le premier de ceux-ci réside dans la chanteuse / leader du groupe ; Fabienne Shine. La qualité de ses vocaux, alternance d’agressivité, "Solid As A Rock", et de douceur, "Every Man, Every Woman Is A Star", et son charme naturel crédibilisent le groupe. Et ce, même si son accent anglais est parfois un peu « limite ». On peut trouver cela irritant ou bien charmant, c’est selon. A cela s’ajoute un réel talent de composition qui est flagrant sur des titres comme le Rock ‘n Rollien "Soul Dealer" et son final émaillé de percussions africaines, "Every Man, Every Woman Is A Star" ou bien "Solid As A Rock" un faux live énergique au diable qui donnera son nom officieux à l’album qui n’en avait pas.
Un autre point fort à prendre en compte réside dans la qualité des musiciens. Que ce soit la paire rythmique, très efficace et présente, ou bien les magnifiques parties de guitare solo de Ross The Boss, la musique de Shakin’ Street est bien mise en valeur et bénéficie d’une interprétation très inspirée. Ce disque permet ainsi de découvrir un guitariste original et talentueux qui multiplie les interventions lumineuses. Il serait un peu exagéré de parler de précurseur alors qu’il y avait plus de dix ans que Ritchie Blackmore pondait des soli de qualité, mais le côté frais et audacieux de soli, à l’image de celui de "Every Man, Every Woman Is A Star" est vraiment du meilleur effet.
Au rayon des morceaux accrocheurs et efficaces, nous pouvons également citer le très calme et mélodique "Susie Wong", dont il se dit qu’il aurait servi de base à plusieurs morceaux de Telephone, ce qui ne me semble pas sauter aux yeux. Mais également "I Want To Box You" aux rythmes surprenants et allant crescendo. Au final peu de choses à reprocher à ce disque qui bénéficie, en outre, d’un son très puissant et clair qui fait ressortir les différentes subtilités d’orchestration et d’ambiance. Tout au plus pouvons nous trouver quelques facilités à "So Fine" et "No Time To Loose", mais vraiment pas de quoi entacher cette belle réussite qui aurait du (pu) se traduire par un succès et une carrière bien plus importante que ce que le groupe rencontra.
En effet après un album live, et suite au départ de son lead guitariste, parti fondé Manowar, Shakin’ Street jettera l’éponge et ne donnera pas de successeur à ce « Solid As A Rock », plus que prometteur. Enfin si, mais il faudra attendre près de trente années pour que Fabienne Shine et Ross The Boss nous ponde un nouveau disque en commun. A noter que l’album a été réédité une première fois en 1990, sans aucun bonus ni packaging particulier, puis récemment par Bad Reputation qui a fait un beau travail en y adjoignant le live de 1980 "Live & Raw", sur lequel officie encore le futur « Homme de Guerre à peau de bête ». Vous savez ce qu’il vous reste à faire.