Il n’est pas facile de se faire une place au soleil dans le genre encombré qu'est le power métal. Et évidemment, ce n’est pas plus évident si l’on vient du Nord, comme nos Finlandais de Celesty, là où ce genre foisonne. Et pourtant ceux-ci semblent encore y croire puisqu'ils nous proposent déjà leur quatrième opus en moins de huit ans. Si les deux premières productions offraient un power métal de qualité avec quelques tentatives plus progressives dans les longs titres « Legacy Of Hate I, II », le troisième simplifiait la donne et durcissait le ton, surtout au niveau du jeu de guitare.
Avec cette quatrième livraison, et même si le line-up reste inchangé, l’évolution semble oublier ce troisième disque et vouloir faire suite aux deux premiers albums, en développant un power métal plus symphonique que métallique. Pour l’enregistrement, ils retrouvent d’ailleurs Samu Oittinen qui avait collaboré aux deux premières sorties. Mais ils reviennent aussi avec plus d’ambition et il est facile de constater que les progrès sont évidents à tous les niveaux, notamment grâce à une production à la hauteur. Ils se sont aussi entourés d’un véritable orchestre et de choeurs de grande qualité. Ces derniers sont utilisés avec doigté et donnent vraiment à l’album sa tonalité, qu’ils soient mis au-devant de la scène, ou qu’ils ponctuent adroitement certains titres. Un bel exemple est ce « Feared By Dawn » qui combine les deux approches.
Si l’interprétation est sans failles, la qualité des compositions suit également, celles-ci étant tour à tour variées, aux rythmes rapides (« Like Warriors »), parfois plus agressives (« Greed And Vanity », « Dark Emotions ») ou plus lourdes ( « Fading Away » et bien sûr « Lords Of The Kingdom », avec des envolées classiques et lyriques (le très bon « New Sin ») mais proposant toujours des refrains bien accrocheurs et des soli agréables. Il y a aussi la troisième partie de leur « Legacy Of Hate », une longue pièce en plusieurs mouvements de plus de 14 minutes, marquée par la très belle voix de Suvi-Tuuli Dietrich (rien que prononcer son nom est déjà excitant, non?). Le chanteur, Antti Railio, y donne aussi toute la mesure de ses possibilités, bien entouré pas les musicos, les choeurs et l'orchestre classique. Sans être vraiment inoubliable, c'est une réussite.
Le seul bémol se situera au niveau de la personnalité, les influences étant un peu trop marquées : Rhapsody Of Fire pour « Like Warriors » ; Sonata Artica sur « Autumn Leaves » et « Feared By Dawn ». Et puis il est tellement dommage que le meilleur titre à mes oreilles, « Lords Of The Kingdom », soit un peu trop inspiré de Manowar. Mais finalement, on s’en fout, on enfile sa cotte de maille, on arrache son glaive, on saute sur son fier destrier et on repart au combat ; « I am The Lord of This Kingdom, Bordel ! »
Avec ce bond qualitatif, et face à des concurrents moins valides tels Rhapsody Of Fire aux oubliettes, Stratovarius qui patine ou Timo Tolkki qui hésite encore entre révolution et renaissance, Celesty prend, sans tergiverser, une place de choix dans la hiérarchie du genre où il devient incontournable. On me chuchote dans l’oreillette que Sonata Artica revient... Oui, mais qui va à la chasse perd sa place !