La première chose qui surprend à l’écoute de ce second album des Cergyssois de Planète Asphalte, c’est la qualité de la production. Rares sont les autoproductions qui allient aussi bien puissance et clarté tout en créant un univers sonore très moderne grâce à l’intégration de quelques effets sonores assez opportuns. L’autre surprise réside dans la dualité (et complémentarité) entre l’agressivité des guitares et le côté bien plus soft (Pop Rock) du reste de l’interprétation, vocaux et batterie en tête. Les guitares sont en effet très puissantes et lorgnent de temps en temps vers le Heavy ou le power métal, alors que le chant, en français, est plutôt doux tandis que la batterie adopte un phrasé très Rock.
L’ensemble sonne très pro et s’écoute avec plaisir et facilité, oscillant entre des univers proches du NEIL YOUNG de l’album « ARC », des THUGS, de SONIC YOUTH, de NH3 et de NO MAN’S LAND. La proximité avec ces derniers est troublante, notamment sur « Horizons Clos » qui rappelle très fortement le défunt groupe gennevillois. La différence essentielle avec les groupes précités réside dans le soin apporté aux compositions et aux arrangements, très travaillés pour ce genre musical. Ainsi le résultat est-il à la fois puissant sans jamais donner dans la violence, et poétique sans pour autant virer au mielleux ou mou du genou, à l’image de « En Attendant », un excellent morceau mené par une rythmique très dynamique qui débouche sur un solo de guitare inspiré.
L’album se distingue par son homogénéité, même si quatre intermèdes musicaux (« Suspension (absence N° 1 à 4) ») viennent aérer un peu le propos, et s’articule de manière très naturelle. Et c’est peut-être là l'un de ses rares défauts. Il manque en effet un peu de surprise et de force dans l’expression des sentiments, des ambiances. Même la présence des quatre intermezzos aux ambiances très diverses ne réussit pas complètement à dissiper l’aspect compact et froid de ce disque. Le pendant positif de ce point est que le groupe bénéficie d’une identité musicale forte et aisément identifiable, qui mêle mélancolie et désenchantement.
Le second point qui pourrait être amélioré est le chant. Non pas que celui-ci manque de puissance ou de charme, mais comme les compositions, lui font parfois défaut un peu de force dans l’expression des sentiments, un peu de diversité. Bien sûr, il arrive à Ceydrick (chant) de faire montre de hargne, mais il y a fort à parier qu’il reste au groupe une marge de progression dans ce domaine. Ce d’autant plus que les paroles, souvent assez alambiquées, apportent un charme indéniable par leur très forte musicalité.
Au delà de ces points mineurs, l’écoute de ce « Schizo/Prophète 101 » provoque de très agréables moments, notamment (mais pas uniquement) avec les titres suivants : « Suspension (absence n°3) » et son phrasé très gainsbourien, le très bon « Prochaine Station : Mutation » dont le titre et les paroles laissent imaginer un clin d’œil à THIEFAINE, ou bien « La chute Des Corps » et son final en boucle du meilleur effet.
En conclusion, Planète Asphalte nous pond là un bon album qui sonne très pro et très inspiré, mais qui aurait peut-être gagné à être un peu plus varié et surtout plus affirmé dans son propos.