En attendant la prochaine livraison discographique de Sonata Arctica, le fringuant guitariste de cette formation finlandaise a tout simplement remis le couvert en solo avec son troisième album, "Fire-Hearted". Elias Viljanen, alias Evil sans le "Spirit", n’a décidément pas envie de s’ennuyer.
Et après tout, pourquoi se priver alors que l’on est considéré à juste titre comme un virtuose de la six cordes. Les deux précédents albums étaient déjà sous le signe de l’instrumental, et ce n’est pas "Fire-Hearted" qui va complètement déroger à cette ligne de conduite. Evil est toujours aussi bien entouré, par des musiciens qu’il connaît, notamment le bassiste J.Kainulainen (Evergrey, ex Stratovarius) mais surtout Henrik Klingenberg, (Sonata Arctica) qui se retrouve en invité de marque aux claviers.
Ce nouveau projet fait donc nettement ressortir la notion de groupe. D’ailleurs cet état de fait se ressent pleinement à l’écoute des douze morceaux, de durées assez courtes en général car n’excèdant que très rarement les quatre minutes. Ces techniciens de haut vol s’en donnent à cœur joie tout en démontrant avec maestria qu’Evil (le groupe, cela va sans dire) sait quasiment tout faire.
Riff catchy, soli fluides et techniques alliés à la rapidité des "Guitars Heros" dignes de ce nom sont légions sur "Fire-Hearted". Les influences d’Elias Viljanen sont particulièrement bien dissimulées derrière ce jeu vif et très moderne. Le titre éponyme en introduction oscille ouvertement entre un Van Halen du milieu des années quatre vingt et un Joe Satriani plein de bonnes intentions. Mais la suite va se traduire par un véritable cocktail de styles musicaux ancrés autour de la guitare d’Evil (le musicien, bien entendu).
Tout d’abord du hard FM/AOR de grande classe au travers des deux titres chantés. Marco Hietala, de Nightwish, se fend d’une solide performance sur "The Last Breath Of Love" au riff accrocheur bordé d’un refrain acidulé, tandis que le chanteur de Sonata Arctica en personne, Tony Kakko, vient donner la réplique à son vieux pote Elias, toujours dans une ambiance très parfumée FM sur "Kiss Of Rain". Déboulent ensuite "Cruel Groove" et "Up To Speed" dans une veine nettement plus power métal mais toujours soucieuse d’un sens mélodique aiguë renforcé par des soli techniques et ravageurs. Ce contraste des genres se renforce davantage lorsque des plages en forme de fugues acoustiques et légèrement planantes comme "My Guiding Light" et "Beautiful Piece" font leur apparition. Entre tout cela, Evil nous sert quelques pièces plus traditionnelles dans le style "Guitar Hero" mais cependant bien travaillées et toujours à forte teneur mélodique comme en témoignent le véloce "Supernatural", "The Triumph" ou encore un "Showstopper" qui rebooste juste à temps l'atmosphère finale.
"Fire-Hearted" cède donc à une très grande diversité, peut-être même un peu trop, à tel point que cet album s’écoute presque aussi vite qu’il aurait tendance à se faire oublier. Du bon travail certes, mais qui pêche par un gros manque de cohésion et qui laisse surtout un arrière goût de déjà entendu. En bref, une production hautement facile d’accès sur le fond comme sur la forme, et dans laquelle se côtoient le très bon et le nettement plus dispensable. L’exemple même du disque calibré et formaté pour faire mouche mais qui, à force de vouloir trop en faire, finit inévitablement par se disperser. Agréable à écouter donc, mais sans plus…