"Je pensais à un truc, là, pour les chroniqueurs : Vous a-t-on déjà proposé un disque à chroniquer sans vous dire ce que c'était, histoire de ne juger que la musique, sans tenir compte de l'historique du groupe ? Bien sur ça ne marcherait qu'avec des groupes non reconnaissables par le chroniqueur, mais ça peut être intéressant comme expérience." - Gorn Raal
Cette question fut posée par un forumeur après que j'ai exposé une situation cocasse dans laquelle je me suis trouvé. En écoutant ma musique quotidienne sur mon mp3 (il faut vivre avec son temps, surtout à mon âge) je suis tombé sur un album complétement dénué d'information. J'ai donc écouté pendant trois jour en boucle une musique dont je ne connaissais rien. Mes misérables tentatives de la rattacher à quelque chose d'un tant soit peu connu échouaient les unes après les autres. Lorsque j'ai finalement compris que mes pauvres fichiers audio étaient tagués en danois, pays d'origine de Star*Rats, le mal était déjà fait: je m'étais fait une opinion sur l'album. Et j'ai ainsi eu l'occasion de réfléchir à la question qui introduit cette chronique, question que j'ai traitée malgré moi et au mépris du principe d'équité entre les artistes qui règne en maitre chez Music Waves. Car mon opinion ne changera pas.
Cet album est excellent, tout simplement. Une sorte de heavy metal déboule dans nos oreilles, mais du heavy différent. Riff bétons propulsés par une batterie binaire ('poum tchac poum tchac') qui sait quand même s'énerver quand il faut, voix de mécano pleine de gniaque, refrains de stade, soli qui s'invitent toujours avec à propos, et pour couronner le tout, un son impeccable qui mélange habilement clarté totale de tout les instruments et petite touche de brutalité qui donne un parfum agréable de sueur et de poussière. Le bilan est consternant de qualité. Mais rien d'inhabituel pour l'instant me direz-vous.
C'est là que vous faites erreur. En écoutant cet album, la première chose que je me suis dite dans mon enquête, c'est que c'était forcément vieux. Loin de la surcompression actuelle qui ne laisse plus passer aucun souffle, la musique présentée ici est un heavy aéré et pourtant ultra puissant et graisseux, laissant de la place au feeling rugueux du rock n' roll. Sans parler de groove dans une musique quand même bien compacte, il est indéniable que les compositions possèdent une souplesse toute particulière qui donne envie de méchamment secouer les cervicales et accessoirement de jeter à la poubelles les albums d'Airbourne, The Answer, et autres clones lubrifiés en se demandant comment on a pu leur filer le fauteuil d'AC/DC.
Autre détail: les morceaux sont tous bons. Là vous vous dites que c'est n'importe quoi, que je parle sous le coup de l'enthousiasme... Mais non. Quatorze titres, et aucun moment faible. Dès que l'attention baisse la garde, un break arrive au coin de la rue, une mélodie de gratte vous tombe sur la tête, un solo postillonné achève de vous replonger la tête dans la bassine.
Lorsque j'ai appris qui avait fait cette merveille, ça n'a rien changé. Le disque se suffit à lui même de toutes manières, et il ne marquera ni la scène ni le grand public. Alors, sorti en 2009, 99, 89, 79, danois, suédois, australiens, premier album, pochette moche ou pas, tout ça n'a strictement aucune importance. Ce disque est une offrande au Dieu rock n' roll qui n'est faite que de décibels.