Après la sortie du superbe Paramount, nous n’avions plus de nouvelles du groupe allemand Sieges Even et pour cause, deux de ses membres, Arno Menses (voix) et Markus Steffen (guitares) ont quitté le navire métal progressif pour former Subsignal avec trois autres musiciens de talent (issus de Dreamscape ou Sun Caged). C’est donc le premier album de ce tout nouveau groupe, Beautiful & Monstrous, qui est soumis à la critique aujourd’hui. Sieges Even était souvent empreint de métal progressif alors que Subsignal voit son spectre élargit avec un mélange de rock progressif assez aérien et des refrains très mélodique dans le genre AOR. On pourra donc parler d’AOR-progressif sans éveiller les foudres des puristes. La question qui se pose est celle de la direction artistique du groupe. Pour résumer, on peut déjà dire que Subsignal pratique du Sieges Even mais pas tout à fait…
Quel meilleur départ qu’un titre faisant la jonction entre le passé et le présent. Les deux rescapés de Sieges Even incorporent une bonne dose de riffs acérés et brulants et le premier titre, « Where Angels Fear To Tread » nous rappelle au bon souvenir du meilleur de Sieges Even. Malgré tout, le développement de certaines autres pistes se fera assez différemment. Beaucoup de claviers sont ajoutés et des ambiances, assez longues à s’installer, viennent ralentir la progression de l’écoute. Pour exemple je citerai le morceau « Beautiful & Monstrous » qui s’étale sur près de dix minutes et qui mise sur le côté atmosphérique du combo. Les guitares sont souvent en son clair et les occasions de jubiler avec de grosses saturations sont plus rares qu’avec Sieges Even. « The Sea » ne décolle vraiment qu’à la fin, avec il est vrai, un magnifique solo à la clef. Subsignal perd en énergie ce qu’il gagne en émotion et c’est là la grosse fracture entre les deux groupes.
« The Last Light of Summer » développe un même riff arpégé son clair sur les deux tiers et ce sont les voix en arrière fond qui portent le morceau en lui donnant un intérêt notable. Sur ce dernier point, un parallèle avec les morceaux les plus lents de Sylvan peut être tenté. « Rain Is The Most Beautiful Color » débute sur un rythme très typé progressif mais le batteur actuel a du mal à faire oublier le groove d’Alex Holzwarth.
La grosse majorité des titres de cet album est donc à mettre du côté des mid-tempo avec les avantages et les inconvénients que cela comporte. On parlera d’AOR de par la grande immédiateté des refrains et la structure assez conventionnelle des morceaux. Le très rythmé « To Hope The Road Is Long » au refrain très proche de Toto vient confirmer le talent des allemands pour le mélange des genres.
Beautiful & Monstrous est donc un très bon album qui signe le retour des deux têtes pensantes de Sieges Even. Même si la complexité n’est pas le principal qualificatif pour cet album, il faudra pas mal d’écoutes pour s’imprégner de la bonne heure de musique proposée. On n’aborde pas Beautiful & Monstrous comme n’importe quel album de rock mélodique et les séquences sont assez variées pour vous permettre de profiter de nombreuses séances d‘écoutes réjouissantes. Malgré tout, on regrettera un virage assez sec dans la composition par rapport à Sieges Even tout en saluant l’esprit d’innovation vers une musique plus accessible. En somme Beautiful & Monstrous est un disque à ne pas sous-estimer ni à encenser à la hâte, et qui fera ses preuves sur le long terme. On attend avec impatience la suite des évènements en souhaitant qu’un compromis entre le style de Paramount et celui de Beautiful & Monstrous soit mieux équilibré.