Mais que se passe t'il au royaume de Suède ? Un savant aurait-il trouvé la formule pour cloner les gloires du Hard-Rock ? En effet, après Grand Design, superbe reproduction du Def Leppard des débuts, voici que débarque de Scandinavie la copie conforme d'AC/DC, voire de son talentueux rejeton Airbourne: j'ai nommé Bonafide. Difficile pari que de se lancer sur un territoire dont les frères Young ont défini les canons depuis de nombreuses années. Nombreux sont ceux à s'y être cassé les dents. Parmi les survivants, nous pouvons citer les persévérants américains de Rhino Bucket, les surprenants français d'Electric Ducks, les espoirs australiens de Snake, et surtout ceux auxquels le trône semble destiné s'il continuent sur les bases tonitruantes de leur premier album: Airbourne.
C'est l'exemple de ces derniers que Bonafide semble vouloir suivre en partie, en incluant des influences punkisantes et puissantes à la Motörhead sur certains titres comme ce "Straight Shooters" sur lequel la charmante Mia Coldheart (Crucified Barbara) vient partager le chant avec un Pontus Snibb à l'organe éraillé par la bière et l'aquavit. Tous les titres s'enchaînent sans temps mort et aucune baisse de régime ne nous permet de reprendre notre souffle. Les riffs sont tour à tour entraînants ("Dirt Bound"), tranchants ("Hard Livin' Man"), ou bien gras ("Elvis Chapel Blues") et le quatuor dégaine quelques refrains immédiats, renforcés par des chœurs virils et directs que ne renierait pas AC/DC ("No Doubt About It", "Fill Your Head With Rock" ou "Sicker Than I Think").
Le tempo semble lui aussi sorti tout droit de l'imagination des Young Bros sur le boogie-hard-rock d'un "Shot Of You", mais les accélérations font plutôt pencher la balance vers Airbourne comme sur un "Dog" catchy, ou sur un "Butter You Up" au refrain claquant. Tout ceci est parfaitement interprété, même si la voix de Snibb semble plus limitée que celles de Brian Johnson ou Joel O’Keeffe. Les interventions de Mikael Fassberg sont excellentes et la section rythmique ressemble à un train lancé à pleine vitesse, écrasant tout sur son passage.
Tout juste regretterons nous que certains refrains ne soient pas aussi accrocheur que les morceaux le mériteraient ("Swan Song"), mais l'ensemble respire la spontanéité et l'authenticité, éléments indispensables à la réussite d'un bon album de Hard-Rock AC/DCien. Bien que restant un cran en dessous d'Airbourne, Bonafide n'en est pas moins une excellente surprise et se positionne comme l'un des dignes héritiers de la bande d'Angus. Une pointe supplémentaire de personnalité sera néanmoins nécessaire pour confirmer les espoirs que ce "Something's Dripping" aura fait naître. Qu'on se le dise, la Suède a trouvé son poulain dans la course à la succession d'AC/DC, même si ces derniers ne semblent pas encore prêts à prendre leur retraite.