Quelques mois seulement après le très réussi "El Rojo" du Bakerton Group, les membres de Clutch reviennent à la charge avec "Strange Cousins From The West", neuvième album studio en bientôt vingt ans de carrière. Décidément infatigables, les musiciens du combo US ne sont pas du genre à s’octroyer quelques instants de repos. Pourtant, Clutch tourne énormément et l’inspiration semble toujours au rendez-vous lorsqu’il s’agit d’aborder un nouveau retour en studio.
Place à la formule quartette suite au départ du claviériste Mick Shauer pour d’autres horizons, Clutch livre une nouvelle production dans la lignée de la précédente, avec toutefois un regain assez prononcé sur les guitares. Ce qui n’est pas une mince affaire lorsque l’on s’épanche sur la discographie de ce groupe prolifique. Neil Fallon, le charismatique chanteur, a repris du service à la six cordes. Et grand bien lui en fasse car sa présence derrière cet instrument confère à l’ensemble du groupe un surplus de cohésion. De ce fait, "Strange Cousins From The West" renforce davantage cette impression de puissance qui caractérise Clutch depuis ses débuts.
D’ailleurs, le son de ce nouvel opus résonne sous les bienfaits de l’enregistrement analogique qui capture l’essence même des notes à la sortie des instruments. Cette méthode de plus en plus rare a cependant pour effet de bien mettre en valeur chaque composante d’un morceau et surtout de restituer un feeling chaleureux et très naturel.
Rien de telle que l’introduction de "Motherless Child" pour se rendre compte en une poignée de seconde que Clutch a parfaitement assimilé ses influences, qu’elles viennent du sud profond ou de l’autre côté de l’Atlantique. Ce premier morceau fait naturellement penser à un Led Zep de la grande époque revigoré à la sauce stoner. Le travail du batteur Jean Paul Gaster est une nouvelle fois impressionnant par sa frappe aussi puissante que rigoureuse. Clutch embraye sur le rouleau compresseur tout en groove qu’est "Struck Down". Le combo martèle de plus belle sous les coups de butoirs du heavy "50 000 Unstoppable Watts" qui mérite vraiment cette appellation.
Tout en restant fidèle à sa ligne de conduite, le quatuor démontre néanmoins que le blues fait partie intégrante de ses compositions, comme en témoigne le majestueux et ombrageux "Abraham Lincoln". Plus original, "Minautor" revêt une couleur sensiblement inquiétante, tandis qu’un "Freakonomics" pertucant et remuant à souhait en découd avec les méthodes très contestables des politiciens. Si "Witchdoctor" et "Let A Poor Man Be" rivalisent de riffs bien gras et de soli profondément encrés dans le stoner rock, le dernier morceau "Sleestak Lightning" suinte le bon vieux southern boogie dans une veine proche de ce que faisait ZZ Top a ses débuts.
"Strange Cousins From The West" recèle de quoi largement satisfaire les amateurs de stoner / blues rock direct et épuré. Clutch représente une véritable machine à riff qui ne perd rien en puissance au fil du temps. En revanche, si les précédentes productions s’écoutaient allègrement mais avec un ou deux titres phares qui retiennent un peu plus l’attention, ce nouvel opus ne fait ressortir aucun morceau en particulier. Seulement, il a l’énorme avantage de se bonifier au fil des écoutes qui permettent également d'apprécier le furieux talent de la section rythmique.
Anti "star-system" par excellence, Clutch vient de balancer un coup de maître avec "Strange Cousins From The West". Véritablement composé pour durer dans le temps, cet album reflète toute la personnalité de ce groupe atypique et productif au bon sens du terme dans le monde de la musique. Et après tout, face à cette convaincante démonstration de force, Clutch est en passe de devenir un exemple à suivre.