Ceux qui ont eu la chance de voir une fois Steve Vai en concert le savent, l’expérience vécue est profondément marquante. Même si aucun enregistrement, aussi bon soit-il, ne retranscrira jamais l’émotion et la communion d’un tel spectacle, il faut bien avouer que le précédent DVD de Steve Vai était particulièrement réussi. Brisons le suspens tout de suite, cette deuxième captation de concert, Where The Wild Things Are, est aussi spectaculaire que le Live At The Astoria et s’en démarque notablement.
Steve Vai nous a gratifié, encore une fois, d’un double-DVD au son et à l’image irréprochables. Les absences de Tony MacAlpine, Virgil Donati et Billy Sheehan sont parfaitement comblées par l’apport de deux violonistes virtuoses, Alex DePue et Ann Marie Calhoun, fraîchement recrutés. A la basse et à la batterie nous retrouvons les très expérimentés Brian Beller et Jeremy Colson, et enfin le compagnon de toujours, Dave Weiner, à la guitare rythmique. C’est à Minneapolis, le 19 septembre 2007, qu’a eu lieu ce concert destiné à rester dans les mémoires.
La liste des morceaux joués est très différente du précédent DVD, d’où son intérêt. Vous retrouverez quand même les fameux "For The Love Of God", "Whispering A Prayer" et "Building The Church" qui restent indispensables en concert, mais le reste est inédit et nous avons l’énorme plaisir d’entendre des morceaux aussi géniaux que "Tender Surrender", "Die To Live" ou "Taurus Bulba" issus des non moins géniaux Alien Love Secrets et Fire Garden. Une des surprises de ce double DVD se trouve dans la section acoustique au cours de laquelle sont joués des morceaux chantés par Steve comme "FireWall" ou le chef d’œuvre "All About Eve". Il faut bien avouer que Steve s’en tire plutôt bien au chant, même s’il est bien secondé aux chœurs par la très belle Ann Marie. Cette femme est, d’une part, une violoniste de grand talent, mais surtout elle possède une classe et un charisme qui éclatent à chacune de ses interventions. Elle en arrive presque à faire oublier l’autre virtuose du violon, Alex DePue, sorte de Stu Hamm aminci et jovial, qui pourtant se charge de jouer les parties à l’unisson avec Vai, qui étaient assurées par Tony MacAlpine dans l’ancienne formation. Steve Vai a eu le nez fin en recrutant ces deux musiciens qui ne chôment pas pendant les près de trois heures du spectacle. Le violon apporte une coloration presque fusion sur certaines séquences et vient asseoir l’effet symphonique que requièrent certaines compositions. L’introduction et le solo de Ann Marie sur "All About Eve" sont bouleversants et Vai n’est plus le seul à pouvoir émouvoir l’auditeur avec son toucher.
Malgré tout, c’est bien Steve Vai qui est à l’honneur dans ce double DVD et par son intermédiaire, la guitare. La mise en scène est faite pour affirmer le côté ésotérique du new-yorkais. Celui-ci est placé au centre d’un tapi, les cheveux brassés par un discret ventilateur. La réalisation nous renvoie parfois un Steve auréolé d’un halo très christique, et la mécanique scénique produit souvent l’effet du messie entouré de ses apôtres quand les deux violonistes, situés de part et d’autre de Vai, viennent le rejoindre sur le devant de la scène. Vai est le guitariste le plus charnel qui soit, mais aussi le plus spirituel. Il fait corps avec ses guitares, qui portent chacune un nom, et il maîtrise le larsen, si handicapant pour n’importe quel musicien, en le transformant en un langage imagé et déchirant.
L’exubérant et tentaculaire Jeremy Colson ne fait pas oublier le monstrueux Virgil Donati mais il assure le tempo et le spectacle avec brio (son duo avec Vai sur sa batterie portative -The Beast- est un grand moment). Brian Beller n’a ni la technique ni le sens de la scène de Billy Sheehan et il ne se cantonne qu’à sa fonction de bassiste. Il faut dire que les vrais seconds rôles de ce scénario sont, cette fois, les deux recrues violonistes.
Comme précisé en introduction, le son et l’image de ce double-DVD sont d’une grande qualité. La réalisation ne reste pas focalisée sur Vai et permet de scruter et décortiquer le travail méticuleux des musiciens. Concernant les bonus, chaque membre du groupe (sauf Vai!) y va de sa petite interview pour nous faire état de son plaisir de tourner avec le maître ainsi que quelques anecdotes sur le quotidien d’itinérant. Enfin une démonstration bien amusante de la nouvelle pédale de distorsion signée Ibanez est offerte. Elle est plutôt bien faite et divertissante et on en oublie presque les vues mercantiles quelques peu dérangeantes.
En bref, ce DVD est un objet indispensable pour tout amateur de ce guitariste définitivement unique. Grâce au talent de Vai et à son goût pour les produits numériques de qualité (une version blue-ray sera commercialisée) c’est le spectacle qui s’invite chez vous. Where The Wild Things Are est un excellent palliatif en attendant un nouvel album qui se fait désespérément attendre.