Oz Noy avait enthousiasmé la rédaction de Music Waves avec son précédent album, Fuzzy, et c’est avec un énorme plaisir que l’on retrouve le new-yorkais pour Schizophrenic. Le jeune guitariste s’est entouré encore une fois d’une ribambelle de musiciens de grand talent dont Steve Lukather (guitare), Dave Weckl (batterie) ou Will Lee (basse). Ce disque, comme son prédécesseur, est un modèle de fluidité au gré d’une musique joyeuse à la croisée du jazz et du rock. Magna Carta, le label connu pour son catalogue progressif, se voit de plus en plus actif dans le registre des guitaristes instrumentaux (Dave Martone en première ligne) ce qui n’est pas pour nous déplaire.
Schizophrenic débute avec un titre qui aurait pu apparaitre aisément sur Fuzzy. « Ice Pick » reprend la recette du jazz classique avec batterie légère et une basse qui donne le ton. La guitare en léger crunch dicte son texte avec de légers effets pour donner de la couleur. Le chorus est percutant et l’ajout de pédalier (surement un flanger ou même une wah-wah) vient bien contraster avec le classicisme jazz utilisé lors des soli.
La suite est plus rock même si le jeu de Oz reste d’une sensibilité toute jazzy. Le morceau se déroule et même sans grands artifices techniques le résultat est parfait de justesse. C’est là tout le charme du jazz-rock: la simplicité et l’évidencee du rock avec la classe et la tenue du jazz. C’est le maître Lukather qui vient poser son solo sur « 120 Heart Beats » avec un toucher que l’on reconnaitrait entre mille paluches. Entre un Michael Lee Firkins et un Michael Landau (« Elephant Walk »), Oz Noy semble avoir trouvé sa place.
Le guitariste nous régale tout autant lors de belles ballades très lancinantes («Seven »), et qui savent montrer un visage écorché (« Elephant Walk ») que de morceaux plus rythmés avec de bons riffs bien tranchants (« Schizophrenic »). Des morceaux plus difficiles d’accès, en tout cas méritant plus d'attention de la part de l’auditeur, font leur apparition. On pense notamment à « Underwater Romance» qui est plus ésotérique et plus riche dans l’expérimentation ou au morceau final « Bug Out » qui sait faire jaillir de la mélodie là il ne semble pas y en avoir. Comme pour Fuzzy, la plupart d'entre elles sont très facilement mémorisables et vous vous surprendrez souvent à construire mentalement votre propre chorus sur une grille d’accord entendu dans cet album.
Oz Noy a l’énorme mérite de dépoussiérer un style trop souvent repoussant pour le commun des mortels. Le jazz s’en trouve grandi et même si quelques concessions doivent être faites au classicisme du genre, il est fort à parier que cet artiste amènera nombres de septiques dans le giron du jazz. Rien ne semble arrêter l’israélien dans son entreprise de fusionner le jazz, le rock et la funk dans une évidence qui ne fait pas défaut. Pour le cas de Schizophrenic une partie plus sombre non négligeable apparait sur quelques compositions. Elle donne quelques aspérités de relief pour justifier probablement le côté schizophrène du disque. Mais si on se place simplement sur le terrain du plaisir, avouons que celui-ci est plus que grand à l’écoute de ce disque essentiel.