Alquin est un groupe de Rock Progressif de Delft (Pays-Bas) du début des années 70. Comme beaucoup de groupes comparables, et cependant de qualité, la formation n’a pas réalisé d’album studio entre 1977 et… 2005 ! Ainsi « Sailors And Sinners », de 2009, fait suite à « Blue Planet » sorti en 2005.
L’album débute avec « The Mission » dont la première minute d’introduction de la piste et de l’album pourrait augurer d’un enregistrement de haute qualité. Le saxophone soprano y est fin et délicat. Pourtant, le long du CD ce seront les saxophones alto et ténor qui seront privilégiés, ce qui n’est pas forcément un défaut ; mais la sensibilité de l’interprète sera moins mise en valeur. Le morceau devient à la suite très classique des « 70s », avec un chanteur juste mais peu charismatique. Heureusement la prestation de ce dernier sera plus convaincante dans les pistes suivantes, plus exactement à compter de la troisième.
« Minnie Minou », le second morceau donne à la guitare une place intéressante. Le saxophone a du mal à se positionner car l’instrument n’est pas toujours adapté au style. Le schéma employé ici, trop classique, ne permet pas au saxophone de pleinement s’exprimer. En revanche la guitare, probablement une Gibson, utilise sans limite les effets disponibles dans la première moitié des années 70 : Overdrive, Fuzz (léger), Chorus, Tremolo et Wah sillonnent l’album. « Lilies Notebook » est par contre un morceau plutôt exemplaire. En effet, après une jolie introduction teintée de mélancolie, à l’image des paroles, l’ensemble enchaine sur une section rythmée telle que les musiciens de progressif aiment à les jouer. Le groupe peut s’exprimer en tant que tel, chacun contribuant à la cohérence de l’ensemble : Batterie intéressante, saxo alto, guitare (overdrive).
« Not In A Million Years » vient ensuite avec une certaine logique. La mélodie inspirée et même amusante s’inscrit dans un schéma standard du groupe et de l’album : saxophone / Hammond / Guitare (Crunch/overdrive + chorus). S'ensuit « Allyson », avec son style ouvertement Southern qui reste sympathique sans faire preuve pour autant de virtuosité particulière, tout comme la piste suivante « Money In The Bank ».
« Kite Runner » est plus intéressant avec son approche résolument progressive dans un style rappelant des modèles du genre. L’introduction est bien trouvée et la progression rythmique bien maitrisée. Sans jamais l’égaler, Michel van Dijk (lead vocals) est toujours nettement inspiré par Peter Gabriel voire Geoff Mann. Avec « Behind The Tree », là aussi la mélodie est inspirée. C’est encore Ferdinand Bakker (guitar) qui sort son épingle du jeu, multipliant les effets classiques. Les autres protagonistes, y compris le saxophone, étant presque relégués aux rangs d’accompagnateurs.
« Holland » est une introduction au morceau-titre du CD « Sailors And Sinners », la piste « épique », la seule, de l’album. Celle-ci débute agréablement par de la flûte sur laquelle vient se superposer l’alto pour céder la place à du wah-wah classique mais maitrisé. Un solo de Hammond court rappelle que le groupe utilise des instruments caractéristiques des années 70 et les utilisent comme tels. A compter de la septième minute le morceau devient moins intéressant, le léger côté « Steppenwolf » n’est pas séduisant ici. A la dixième minute le style d’abord vocal se montre plus inspiré avec un eternel et classique « at the end of the day » final. Le saxophone et le Hammond, enfin la guitare sont de la partie. L’amateur de passages instrumentaux « Jazz-Rock » style « Flower Kings » n’y trouvera pas son compte, même si le niveau est très difficilement accessible. Le final du morceau aurait mérité davantage d’ampleur.
« Sunshineseethe » conclut le CD avec un arrangement vocal du type « Jon Anderson », sans la voix. Mais il ne faut pas jeter la pierre sur le chanteur car celui-ci est bon sur l’ensemble de l’album et laisse penser qu’il doit être agréable d’assister à un concert du groupe. En effet si cet enregistrement ne s’envole jamais, les musiciens ont visiblement ici pris beaucoup de plaisir à travailler ensembles, certes sans emmener réellement l’auditeur avec eux. Mais il est probable que la cohésion évidente à l’intérieur de ce groupe doit créer des prestations live agréables pour les musiciens comme pour l’auditoire.
L’album dans son ensemble est donc de qualité, avec cependant un début laborieux. Les sonorités et le style sont dans la plus pure tradition du début des années 70, notamment par l’absence de synthétiseur. A cette époque là, peu de musiciens pouvaient s’offrir un Moog. On peut regretter que la formation n’est pas saisi l’opportunité de mettre en œuvre des technologies instrumentales améliorant la performance sans tuer l’esprit. Les inconditionnels de la première moitié des 70s apprécieront, quant à ceux qui veulent découvrir la période en question ils devront plutôt évidemment s’orienter vers les valeurs sûres de l’époque que sont Genesis, Yes ou encore Camel…