Un an seulement après l'anecdotique Metal Magic, la panthère texane refuse d'en démordre : quand on a le rock dans le sang, inutile de lutter ! Et seules les mauvaises langues contesteront le fait qu'à force de persévérance, Pantera commence à tirer son épingle du jeu.
"Projects In The Jungle", c'est tout d'abord l'explosion d'un duo. La fratrie Abbott se révèle pour la première fois sur cet album. Par leur entente manifeste, ils créent l'ossature du groupe, structure indéfectible qui perdurera jusqu'à ce triste soir de décembre 2004, sur lequel nous ne reviendrons pas. Mais ce qui est le plus déterminant, ce sont les débuts du Thrash en Californie, genre qui va inspirer nos deux protagonistes.
En effet, si l'ambiance est toujours au lycra moulant et aux permanentes improbables, le glam se nuance ici avec une férocité venue de l'Ouest, évolution salvatrice qui autorise l'émergence palpable d'une identité. Bien sur, tout cela est encore très discret, mais écoutez un peu le solo de "All Over Tonight", ou mieux, le morceau-titre, avec son intro tonitruante et ses riffs énervés... Darrell y va de son instrumental, "Blue Lite Turnin' Red", un cafouillis immonde qui ne restera pas dans les mémoires, mais qui à l'image d'un certain "Anesthesia (Pulling Teeth)", démontre un souci de recherche et de créativité évident. Le titre "Heavy Metal Rules" est également symptomatique d'une évolution amorcée qui ne se démentira plus.
Pour autant, le côté FM n'est pas mis de côté, et bénéficie d'ailleurs lui aussi de progrès en termes d'écriture. Ainsi, "Takin' My Life" a tout de la ballade de jukebox, et "Like Fire" est un vrai tube 80's, formaté mais d'une efficacité redoutable ! On note enfin que même les ballades bénéficient de soli certes classiques, mais d'une exécution irréprochable. Darrell dresse l'ébauche d'un mythe, et on en vient à se demander comment un tel talent a pu être si longtemps ignoré. Toujours produit par papa Abbott, "Projects In The Jungle" est en effet boudé par tous les labels de la région, et ne demeure "qu'une" autoproduction. On imagine ce que certains patrons de maisons de disques ont pu regretter, dix ans après, quand "Far Beyond Driven" explosera le Billboard 200.
Pas encore tout à fait convaincant, mais d'un niveau bien supérieur à son aîné, voilà un disque bien sympathique, quasiment impossible à trouver aujourd'hui physiquement, mais qui mérite toute votre attention... Un petit morceau d'histoire !