Fred Schendel et Steve Babb, membres fondateurs et leaders de Glass Hammer, nous proposent leur nouvel album studio “Three Cheers For The Broken-Hearted”, le précédent remontant à deux ans. Si les performances en concert du groupe - pas moins de trois DVD live à ce jour - rassemblent jusqu’à onze interprètes sur scène sans compter les ensembles choraux, c’est ici le concept restreint du trio qui a été retenu.
Jusqu’à « Shadowlands » inclus, Fred Schendel et Steve Babb se partageaient respectivement claviers/guitares/batterie/chant et basse/claviers/chant, avec un nombre variable de chanteurs et chanteuses, majoritairement de bonne qualité. Pour “Three Cheers For The Broken-Hearted”, outre nos deux multi-instrumentistes le chant est essentiellement confié (sept titres sur onze) à Susie Bogdanowicz, membre du groupe depuis «Chronometree». Toujours juste, elle a une très belle voix, merveilleuse d’émotion, ce qu’elle confirme largement dans cet enregistrement. Sur les quatre autres titres donc, c'est Fred Schendel qui est au chant. Il se fait parfois récitatif, ce qui rappellera à l’auditeur certaines plages de «Lex Rex». A défaut d’une voix charismatique, ces pistes offrent une certaine alternance à l’écoute, sur le plan vocal, sachant cependant que Susie Bogdanowicz ne lasse jamais. Il convient tout de même de noter la présence d’invités à la guitare : Josh Bates sur le titre éponyme et sur «A Bitter Wind», ainsi que David Wallimann sur «Sleep On».
Exit donc les grandes formations et exit également les longues plages épiques telles celles du brillant «The Inconsolable Secret». Dans “Three Cheers For The Broken-Hearted” les onze titres font en moyenne quatre minutes et demie chacun. Seul l’excellent «Hyperbole» déroge à la règle avec ses 7’38’’.
La première écoute ne déroutera pas l’auditeur. « Come On, Come On” débute l’album et dès le premier couplet Madame Bogdanowicz nous aiguille sur le titre du CD: “Time to see the show, Three cheers for the broken-hearted”. L’auditeur aura par la suite la surprise de ré-écouter «A Rose For Emily» des Zombies, dans une version agréable mais qui apporte peu à la composition de Rod Argent. Après plusieurs écoutes quelques morceaux ressortent nettement de par la qualité de leur composition et de leur interprétation, tels « The Lure of Dreams », « The Curse They Weave » ou «Hyperbole».
Glass Hammer nous a habitué à des textes d’un niveau parfois complexe et toujours intéressant, issus du (bon) gout littéraire de Steve Babb. Dans un passé proche il a trouvé son inspiration dans Tolkien ou encore C.S. Lewis. Ici les territoires visités sont plus proches de notre société que de la Terre du Milieu ou de Perelandra.
Les textes sont plus sombres et n’ont pas le côté épique, à l’image de l’épopée napoléonienne de «Shadowlands», des albums précédents. Sans doute l’écriture se veut plus réaliste et par conséquent plus sombre…
Fred Schendel, claviériste, guitariste et batteur est un musicien intelligent et efficace. Il maitrise totalement ses claviers même s’il se montre plus modeste quantitativement qu’à l’accoutumé. A défaut d’être transcendant à la guitare son jeu est classique et toujours juste ; des mauvaises langues diraient un peu cheap. Niveau batterie, le son de sa caisse claire peut étonner dans un premier temps, sec et un peu en retrait, mais il finit par devenir carrément plaisant. Steve Babb est lui aussi un musicien intelligent et un excellent bassiste dont le son et l’attaque ajoutent beaucoup à l’intérêt de l’ensemble.
Même si La production est irréprochable sur l’ensemble du CD, il n’échappera pas à l’audiophile (trop pointilleux) deux à trois trés légères maladresses d’effets stéréophoniques surprenants (ou pas?) de la part de chevronnés du 5.1.
Glass Hammer, sous forme de trio, nous offre un album assez réussi grâce bien sûr à la grande expérience mais aussi à la sincère sensibilité de Fred Schendel et Steve Babb. La très belle voix de Susie Bogdanowicz apporte beaucoup à la qualité de l’ensemble et au réel plaisir à l’écoute. “Three Cheers For The Broken-Hearted” ne déplaira donc pas aux amateurs du groupe et ne déroutera pas non plus les inconditionnels. On ne pourra cependant que conseiller à ceux qui voudraient découvrir Glass Hammer de s’orienter sur «The Inconsolable Secret», «Chronometree» ou encore «Shadowlands».