Tommy Denander, producteur et guitariste de renom, est définitivement un stakhanoviste du Rock. Pensez un instant que ce garçon-là a participé à une somme colossale de projets. Les lister ici serait fastidieux, mais, afin que vous puissiez vous faire une idée des groupes dans lesquels il a pu, sous ses deux casquettes, s’impliquer et discerner ainsi sa veine musicale de prédilection, sachez qu’on peut citer AOR, Audiovision, Eclipse, House of Shakira, Radioactive, Jaded Heart, Last Autumn’s Dream, Lions Share, Street Talk et Talisman. Avec stupéfaction, en consultant son site, vous trouverez une liste d’environ 600 projets ! Effarant, mais véridique.
Associé au vocaliste Kristoffer Lagerstrom, avec qui il a travaillé sur les albums de Radioacative (le suédois assurait les backing vocals), il a crée en 1997 le combo Spin Gallery qui nous intéresse aujourd’hui. Le groupe vient en effet de sortir son second opus au chaleureux nom d’« Embrace ». A la sortie de leur premier album, Dave Reynolds le fondateur du magazine anglais bien connu Kerrang, avait lancé : « Voilà la meilleure chose que j'ai entendue en dix ans ! ». Voici quelque tirade qui laisse espérer des lendemains qui chantent. Alors, l’essai est il aujourd’hui transformé ?
En fait, cet album est, en première approche, assez déroutant. Le brassage d’influences musicales qui le caractérise y est assurément pour beaucoup. Voilà une intention propre à attirer des mélomanes de sensibilités disparates mais, à trop proposer à foison, on risque de déstabiliser l’auditoire et avoir quelques difficultés à satisfaire le client sur suffisamment de morceaux pour emporter l’adhésion de chacun. Car en effet, bien que cet opus navigue binairement entre le Rock Progressif et l’AOR, il n’en demeure pas moins qu’on y côtoie un nombre de groupes non négligeable. Comme ces deux mondes (plus particulièrement le premier il est vrai) voient en leur sein évoluer des groupes aux originalités fréquemment différentes, le risque n’est pas négligeable, en piochant allègrement tous azimuts, de laisser sur le bord du chemin même des amateurs des genres suscités.
En effet, même si « Embrace », l’excellent premier titre de cet album (le meilleur avancerais-je en fait) nous conduit en territoire connu dans le bastion de l’AOR de qualité avec un mid-tempo lumineux de mélodies ciselées sur toutes les lignes (couplets, refrain, chœurs, solo), le reste est digne d’un melting-pot à en perdre son latin.
Dans cette foisonnante production nous traversons les univers de quelques fameuses pointures. Voilà quelques indices pour faire un amusant blind-test avec vos amis adeptes du genre, rien d’exhaustif, la chasse reste donc ouverte !
- Alan Parsons Project dans l’envoutant « Brilliance of the Drugs » où on rencontre également l’Eloy de « Performance », le brillant « Indulge » où on côtoie aussi Asia sur la mélodie et « Everything Fades » qui fait également penser à ELO,
- Yes époque « 90125 » dans le réussi « Stone by Stone » et ses bonnes parties de basse,
- Toto dans l’entraînant « Just A Momentary Why » où la toujours charmante Robin Beck pousse habilement la chansonnette, la mélodie du balançant « Tic Toc » et « You Do The Things You Do » sur le refrain,
- Saga sur les claviers de « Eyes Wild Open », le couplet du parfois funky (normal Dan Reed vient y apposer sa ritournelle) « You Do The Things You Do », les funky « Without Love et « Tic Toc » et « The End »,
- Sting dans la ballade ‘‘au coin du feu’’ « Blood in my Veins » avec ses petits claquements de doigts apaisants,
- A-HA avec l’entrée en matière du guilleret « Eyes Wild Open »,
- Les Buggles (!) dans le démarrage curieux du relativement appuyé « Everything fades ».
Un seul et unique fil rouge pour vous guider, les breaks, quasiment tous teintés Saga et une seule marque de fabrique pour vous rassurer, la qualité des compositions qui méritent toutes une écoute attentive. C’est toujours mélodieux, c’est léché voire pourléché, très professionnel donc et, cerise sur le gâteau, ça plaira assurément à Madame qui remerciera nos amis de ‘‘la galerie du tournoiement’’ de la reposer des murs de riffs quotidiens que vous lui faites supporter dès que vous appuyez sur le bouton ‘‘play’’...