Cela faisait 12 ans que Rhino Bucket ne nous avait rien proposé de nouveau. Les mauvaises langues vous diront qu'étant donné sa proche parenté stylistique avec AC/DC, cela fait même beaucoup plus longtemps. Le groupe assumant ses influences sans tomber dans un simple plagiat, nous ne partageons pas cet avis et c'est donc avec plaisir que nous retrouvons Georg Dolivo et sa bande. Seul le fidèle Reeve Downes a survécu aux changements de line-up et assure toujours les parties de basse avec discrétion et efficacité. Le poste de guitariste lead est désormais tenu par Brian Forsythe (ex Kix) alors que nous découvrons avec surprise que la batterie est assurée par la charmante Jackie Enx. La surprise est encore plus grande lorsque nous apprenons que Jackie est en fait Liam Jason, batteur original du groupe, qui est devenu une femme depuis ! Maintenant que les présentations sont faites, passons au contenu de cet attendu "And Then It Got Ugly".
Nous le disions en introduction, Rhino Bucket assume ses influences et ses dernières sont à chercher du côté d'un gang au guitariste en culotte courte, alors que la voix de Georg Dolivo, si proche de celle de Bon Scott, renforce les ressemblances. Pourtant, ceci n'empêche pas le quatuor US de nous servir un excellent album, varié et efficace, qui ne tombe jamais dans la redite, ni dans la copie carbone. A ce titre, des morceaux tels que le gros blues-rock mid-tempo de "Word", les couplets pop-rock de "Invisible", ou la ballade "I Was Told", version revisitée d'un titre déjà présent sur "Pain" mélangeant mandoline et acoustique, viennent prouver que le combo n'est pas qu'un simple clone.
Par contre, si le son d'AC/DC représente une partie de l'identité de Rhino Bucket, Dolivo et sa bande savent également déverser une énergie équivalente à celle de la Young Corporation, ce qui n'est pas donné à tous le monde. Le début d'album est d'ailleurs un festival dans ce domaine, alternant des titres aux riffs hyper efficaces ("Welcome To Hell"), des tempos soutenus ("Don't Bring Her Down"), ou du boogie hard-rock accrocheur ("Monkey Boy Highway"). Nous noterons d'ailleurs l'apport des interventions de Pat French à l'harmonica sur ce titre, ainsi que sur "Word", permettant là-aussi de s'éloigner un peu de l'ombre du gang d'Angus. Enfin, malgré la qualité générale de l'ensemble, il est impossible de ne pas citer "Dead & Well" et son refrain à la fois vicieux et désabusé, la tornade "Smile" au riff aussi direct que ses paroles, et enfin un "Blood, Sweat & Beers", variant les tempos entre une intro sur fond de percussions tribales et un final à la redoutable accélération.
Vous l'aurez compris, "And Then It Got Ugly" est à classer dans la catégorie des retours gagnants, Rhino Bucket réussissant le difficile pari de trouver un parfait équilibre entre évolution et tradition. Les quelques touches d'originalité qu'il disperse sur cet album permettent au groupe de se présenter sous un nouveau jour, alors que son style direct et caractéristique reste une base incontournable pour les fidèles des premiers jours. Applaudissons donc au retour d'un groupe qui réussit à marier intégrité, efficacité et ouverture, et qui par la même occasion, s'ouvre d'excitantes perspectives.