Un album de rock français est toujours un moment délicat dans la vie d’un chroniqueur. Généralement élevé au bon grain de tout ce que les terres anglo-saxonnes ont pu lui donner de références mythiques, notre homme est régulièrement circonspect lorsqu’il découvre que certains de ses compatriotes s’essaient encore à un style qui ne leur aura jamais vraiment réussi.
« Parbleu ! » s’écrient certains au 3e rang, « Il y a pourtant eu les Trust, Téléphone, Noir Désir… et Johnny !». Certes, certes, il y a bien eu en France quelques groupes de rock, mais il semble que jamais il n’y ait véritablement eu de culture rock. Bon nombre de groupe ont surfé sur les modes, la Team Nowhere pratiquant par exemple un néo-à-la-française en son temps, mais jamais il n’y aura réellement eu d’esprit rock au sein de nos frontières : je l’affirme et tant pis pour la polémique !
Je l’affirme et… Je me trompe ! Car c’est précisément là où si peu de français ont mis les pieds que Mityx vient poser ses amplis. Révisant son histoire en empruntant à Noir Désir sa noirceur, baigné dans l’énergie du rock anglais de New Order à Franz Ferdinand, et lié à la scène actuelle en se plaçant dans le sillage d’un Ghinzu pour sa rage froide, notre trio dégage une surprenante originalité en s’autorisant quelques clins d’œil au charme classieux de la Cold Wave.
Tant d’influences pour un premier album auraient pu se révéler difficiles à synthétiser, mais Mityx n’a strictement rien d’un groupe amateur. Sachant pertinemment là où il veut aller et ne s’embarrassant pas de fioritures ou détours inutiles, le groupe nous entraîne dans son propre univers en 12 morceaux à la qualité presque toujours égale. Mélodies envoûtantes et riffs hypnotiques s’alternent alors au sein d’une même pièce, le chant clair et profond de Martin venant couronner l’ensemble.
C’est trop, n’en jetez plus ! Non seulement le rock français existe mais en plus il est de très belle facture ? Et bien oui ! Et je tiens par ailleurs à poursuivre ce concert d’éloges par une mention spéciale adressée à la production sans faille dont a su se parer le trio. Nous sommes si habitués en tant que chroniqueur à recevoir des créations gâchées par un soin approximatif apporté à leur enregistrement, que la seule écoute du splendide et très post-rock « Boarding Time » avec ses murs de guitares et sa basse profonde est un plaisir immense.
Un bémol ? Deux peut-être, mais de ceux que le talent et l’expérience auront tôt fait de corriger. Quelques petites inconsistances dans les lignes de chant tout d’abord, qu’un peu plus de confiance en soi et de pratique balayeront dans des délais sans aucun doute très brefs. Un infime sentiment de linéarité ensuite lorsque l’album achève sa rotation, écueil dont on entrevoit déjà la solution à chaque note de l’étincelant « Riot Under The Storm » qui sait se faire la synthèse de tout ce que l’on aime déjà chez notre trio bayonnais !
S'il faut conclure, pourquoi ne pas le faire sous forme d’ouverture comme le propose l’excellent « Openings » parachevant ce bel ouvrage ? Mityx m’a surpris, m’a ému, m’a transporté et surtout m’a donné envie d’entendre la suite. C’est tout ce que l’on demande et bien plus encore à un premier album. Félicitations chers amis, vous avez su raviver en moi la flamme du rock français !