Kip Winger a plus d’un tour dans son sac. En plus de la sortie récente de son dernier album sous les couleurs de Winger, le label Frontiers vient de publier le premier album de Blackwood Creek. Alors quel rapport entre le talentueux bassiste à la carrière bien remplie et ce groupe dont le dynamique label italien n’a eu aucune retenue à lui ouvrir ses portes ?
Blackwood Creek, c’est avant tout une affaire de famille. Le premier combo de Kip Winger pour être plus précis. Accompagné par son frère Nat à la batterie et un ami de très longue date en la personne de Peter Fletcher à la guitare, Kip Winger s’est organisé un véritable retour aux sources. D’ailleurs, la bonne vieille formule power trio semble la mieux adapté pour honorer dans les meilleures conditions cette immersion vers ce qui fut le terrain de prédilection du très jeune Kip Winger en ce début des années soixante dix.
Rien qu’en y repensant, il est assez facile de décrire les influences que ce genre de groupe débutant dans le hard rock aurait pu mettre à profit. Sans aucun doute Led Zeppelin, Black Sabbath, Deep Purple ou bien encore Free demeurent parmi les plus représentatifs de la génération post sixties. En se reformant après presque trente ans de séparation, Blackwood Creek rallume la chaudière. Mais pas question pour Kip Winger et ses acolytes de présenter de vieilles démos réenregistrées ou remaniées. Ce premier album a donc l’avantage de présenter onze titres récemment composés dans une ambiance accolée au style de l’époque que le trio a choyé avant que Kip Winger n’embrasse la notoriété.
De hard rock, il en sera bien évidemment question sur cette galette. Mais le trio sait pertinemment comment s’y prendre pour rendre intéressant et digne d’écoute ce qui aurait pu passer pour une réunion de vieux grincheux en quête de jeunesse éternelle. Blackwood Creek attaque fort dès le premier morceau. Le rythme speed soutenu par un riff simple et très efficace met tout de suite dans l’ambiance. Mais la suite se veut nettement plus nuancée, avec toujours ce même goût du perfectionnisme qui colle à la personnalité de Kip Winger. Les harmonies vocales sont nombreuses et très bien mises en valeur sur la majorité des titres.
Le trio prend donc tout son temps pour alterner entre des ballades électro-acoustiques mélodieuses et surtout des mid tempo bien soutenus par une section rythmique au code génétique certainement très proche. La guitare de Peter Fletcher tient bien entendu sa place avec beaucoup de conviction. Le style pratiqué par ce musicien repose avant tout sur le feeling et la précision.
Si la première partie de l’album fait la part belle aux plages très mélodieuses et accessibles, le ton se durcit nettement sous les coups de butoirs de "Jimmy And Georgia", zeppelinesque en diable. Gros riff, batterie lourde, refrain accrocheur, voilà de quoi enchanter les tympans d’un aficionado de l’ère seventies. Nat Winger prend le micro sur un "Love Inspector" teigneux, tandis que l’album se termine par une authentique ballade dont le long solo de guitare bien senti et tout en finesse rappelle allègrement les bienfaits de la vieille école des "guitars heros", Paul Kossof en tête.
Blackwood Creek n’apporte certes rien de vraiment exceptionnel, mais la volonté de faire passer un agréable moment reste le fer de lance ce premier album. Sans prise de tête, ce hard rock 70’s direct, épuré et néanmoins mélodique fait honneur à cette grande époque. La qualité du contenu permet même à cette production de dépasser largement le simple stade de la curiosité compte tenu, en plus, de l’enracinement profond de la saga "wingerienne".