Quand bien même c'est un peu moins le cas aujourd'hui (quoique le groupe sait encore se montrer provocateur sur scène notamment), Nashville Pussy a beaucoup misé à ses débuts sur une imagerie pornographique et une réputation sulfureuse très "Parental advisory - Explicit lyrics". "Let Them Eat Pussy" le prouve. Un nom qui se passe de commentaire et une pochette cul(te) à l'avenant ont suffit à marquer - et à échauffer ! - les esprits en 1998, année qui voit les Américains débouler dans les bacs pour la première fois. Montrer deux minettes en train de se faire prodiguer une petite gâterie par deux mecs : il fallait oser ! Eux l'ont fait.
Mais provoquer pour provoquer n'a que peu d'intérêt si la musique ne suit pas. Ce n'est évidemment pas le cas ici. Pilotée par un couple façon Stone et Charden avec le chanteur (et gratteux) Blaine Cartwright et la guitariste Ruyters Suys, sorte de réplique d'Angus Young avec une paire de seins mais une énergie identique, la chatte de Nashville se dévoile avec cette galette sous un jour bien plus sale que sur ses derniers opus. Brut et direct comme un coup de santiags dans l'entre-jambe. Le groupe y vidange des brûlots très courts et rustres, au feeling presque punk dans l'esprit.
Le line-up est le préféré des fans, c'est-à-dire avec la sculpturale bassiste Corey Parks, pour seconder un combo qui ne perd pas de temps à parlementer : il branche ses instruments et fait parler la poudre. Point barre. Les grattes sont trempées dans le whisky frelaté de contrebande et dans le cambouis, usinées par la dynamo vivante Ruyters, tandis que le chant de son ours de mari fait de celui-ci l'enfant bâtard né de l'accouplement sauvage entre Lemmy et feu Bon Scott.
Pas de prise de tête donc ou de message philosophique mais seulement (ce qui est déjà pas mal) un bon hard rock méchant et crado aux tâches bluesy et southern, un rock qui sent sous les bras taillé pour les bastringues du fin fond du Texas. Ces titres ne dépassent que très rarement les deux minutes, c'est dire l'urgence qui transpire de leur pores. Des crachats tels que "Snake Eyes", "You're Goin' Down" ou "5 Minutes To Live"" sentent bon la première prise, l'instantané ; ils sont de ceux qui donnent envie de taper du pied. Parfois, ils peuvent être plus sombre ("Blowin' Smoke") et emportés par une rythmique de bucheron. Fleuries ("All Fucked Up", "Eat My Dust"), les paroles sont l'oeuvre de véritables poètes.
Intense et fiévreux, "Let Them Eat Pussy" suinte l'interdit, la licence. Grâce à lui, Nashville Pussy fait une entrée remarquée et remarquable sur la scène rock après seulement deux années à écumer les rades de l'Oncle Sam. C'est aussi tout le charme de la première fois, maladroit par moment mais entrainé par une énergie incroyable. Un classique qui dépasse largement la simple gorgée pour bikers buveurs de bières.