Voilà quelques années déjà que l'on note une scission claire dans le petit monde de l'extrême, avec d'un côté des genres en perte de vitesse, frôlant la disparition malgré quelques irréductibles (le thrash avec Slayer, le hardcore avec Kickback...), et de l'autre le death metal, rejeton bâtard du thrash des années 80 ayant depuis une décennie phagocyté tous ses frangins. Et voilà donc un nouveau groupe de death, qui nous vient cette fois de Grande Bretagne. Sont-ils alors les dignes héritiers du mythique groupe Carcass, ou une bande de jeunes aux dents longues désireux de surfer sur la vague "death moderne" ?
Eh bien, Carcass n'a aucun souci à se faire, soyons clairs ! Les maîtres du bourrinage britannique ne seront inquiétés que d'un point de vue purement sonore, car 2010 et Nuclear Blast obligent, The Reign Of Darkness est produit avec soin et possède une lourdeur des plus satisfaisantes. Mais c'est au niveau des compositions que le bât blesse. Plus accessible que son prédécesseur, l'album abandonne certaines influences plus ou moins extérieures (hardcore, thrash, brutal death technique, etc.) pour revenir à un gros death basique, plutôt efficace mais d'une redondance incontestable. Growl carré et sans surprise aucune, un peu de blast beat par-ci par-là, du riff tout en saturation qui sent le dessous de bras... La cahier des charges est respecté à la lettre, et se permet même quelques petites fantaisies, à l'image de "Into The Black Slumber", épilogue de plus de 8 minutes qui tranche, par son aspect vaguement prog, avec les multiples petites brutalités de 3-4 minutes qui composent le reste du disque. Mais cependant, l'auditeur, lui, s'ennuie ferme, et même en remuant la tête au rythme de la musique pour se mettre dans l'ambiance, aura tôt fait d'aller voir ailleurs si les plaies sont plus purulentes.
Attention toutefois, nous n'avons pas affaire ici à des débutants ineptes ou à de simples incompétents, loin de là. C'est très pro, carré et bien emballé, mais il manque un élément essentiel : l'identité. Annotations Of An Autopsy en semble en effet tristement dépourvu, et se borne à aligner les morceaux sans jamais vous prendre de court. Il serait très injuste de parler d'album raté, donc, mais il eût peut-être été préférable de prendre plus de temps pour offrir un successeur à Before The Throne Of Infection, sorti il y a moins de deux ans et qui souffrait déjà de tares similaires...
A réserver aux inconditionnels de ce death metal contemporain, ou aux plus curieux d'entre vous. Les plus exigeants (et les plus blasés) passeront leur chemin.