Sorti en 1999, « Mindfields » signe pour Toto le retour d’un rock riche et coloré et d’un groupe « Larger Than Life ». Finies les ambiances plus directes d'un quatuor au spectre musical réduit, Bobby Kimball, chanteur originel qui fût si difficile à remplacer après le pilier « IV » en 1982, réintègre les rangs.
C’est Lenny Castro qui ouvre le bal au son d’une darbouka, sur un titre riche en percussions qui possède un esprit très « Lukather solo » (Phil Sousan y est pour quelque chose). Malgré le retour de Kimball, c’est Steve qui démarre au chant. « After You’ve Gone » donne dans un pop-rock feutré doté d’un refrain agréable et de guitare de velours. Toto dégage une force tranquille avec son groove et sa technique au service de la musicalité. Sur la fin du titre, Steve fait siffler sa guitare et apporte quelques touches de cithare électrique. Nous sommes déjà comblés. Bobby arrive alors sur le second titre et l'on sent l’envie d’en découdre. « Mysterious Ways » possède des allures « d’opener », bien qu’il soit très (trop) court. Luke fait des allers-retours en guise de gimmick, les cuivres chauffent, les chœurs éclatent, c’est carré et punchy.
La suite restera globalement dans le même registre en dehors de quelques titres plus faiblards. « Mindfields » impressionne avec son ambiance reggae qui se pare de sons électroniques et de tendances ethniques. « High Price Of Hate » est un slow blues de 10 minutes structuré comme une jam de fin de soirée dans un bar enfumé. Bobby donne tout, et prouve qu’il est toujours en grande forme et de loin le meilleur chanteur de la carrière du groupe. Avec le groovy « Selfish » et ses sons de clavier grinçant on se rend compte que depuis le début de l’album, Toto s’amuse. Il change de costume, ose et emporte l’auditeur dans cette valse surprenante aux multiples visages, à l’image de l’artwork. La basse ronfle, la voix et les chœurs font mouche et la guitare, indisciplinée, se faufile partout. Et une fois de plus, les musiciens parviennent à faire passer en douceur des rythmes très complexes.
L’album s’achève sur « Better World », peut être le joyau de ce disque, un titre progressif de grande classe contenant dans sa partie centrale une magnifique ballade dans laquelle Steve Lukather se révèle poignant. L’intro, très alambiquée et un peu psychédélique, file le tournis et l’envolée finale est du plus bel effet. Le titre bonus est le superbe « Spanish Steps Of Rome ». Il aurait mérité de figurer sur l’album en lieu et place d’un titre en « Love ». On y retrouve avec délice la voix rare et feutrée de Paich (qui définitivement se marie bien avec les percussions), la guitare « espanisante » de Luke et de sublimes chœurs féminins éthérés. De toute beauté !
Second album avec Simon Phillips et avant dernier avec Steve Lukather, « Mindfields » possède un son puissant et une production de haut niveau, qui même après dix ans n’a pas à pâlir face aux productions actuelles. Les musiciens n’ont plus rien à prouver et le groupe renouvelle son répertoire, le dynamise aussi. Les cuivres et percussions en tous genres font leur retour et côtoient des ambiances lumineuses et inspirées. Bien sûr, l’album, sous estimé, possède ses détracteurs dont certains lui reprochent une trop grande diversité, un côté fouillis. Si diversité il y a, elle ne trahit jamais un manque d’unité ayant comme fil rouge la patte et la classe indéniable d’un grand groupe. Bref, « Mindfields» peut prétendre à figurer en tête des meilleurs albums de Toto qui est définitivement un grand et puissant groupe d’AOR et un maître incontesté du genre !