Il faut se le dire, s’en convaincre une fois pour toute, une reformation de Savatage n’est pas à l’ordre du jour et ne le sera sans doute jamais! Alors il nous reste Jon Oliva et ses TOS, et ses JOP, profitons-en ! C’est le quatrième album de JOP (Jon Oliva’s Pain) que je tiens entre les mains, et c’est peut-être avec lui que la filiation avec Savatage se fait le plus sentir.
Comme à son habitude, Jon a été fouiller dans ses archives musicales pour nous retrouver des riffs de son frère Criss, tragiquement décédé en 1993. On les entend notamment sur « Lies », une chanson qui traite des premiers pas de Savatage dans le show-business, ses boires et déboires. C’est assez « right in your face », concis, avec des riffs insistants, mais aussi des guitares lyriques et mélodieuses, un break basse batterie au 2/3 qui fait la différence, pour repartir de plus belle, une belle entrée en matière ! « Death Rides A Black Horse » enfonce lentement son tempo, mais profondément ; les claviers virevoltants à la Manfred Mann sont surprenants mais efficaces, le refrain insoutenable, du tout bon.
Sans vouloir faire du piste à piste, reconnaissons le crescendo du premier au troisième titre. La plage titulaire, « Festival » en constitue un sommet qu’il va même être difficile à dépasser. Composé par Jon Oliva suite à un cauchemar, la musique de foire (chez nous on dit kermesse) est au début attirante, pour rapidement devenir oppressante et vous prendre au piège de ce néfaste « festival ». Le riff est fabuleux, et s’intègre à merveille avec la voix de Jon que certains trouveront par ailleurs parfois « too much ». Le Savatage du « Hall Of The Mountain King », n’est pas loin, la maturité et les ficelles en plus !
La suite reste plutôt sombre, moins aventureuse musicalement que Global Warning, mais plus cohérente, moins dissipée, et toujours efficace. On appréciera pourtant les cordes et claviers ainsi que le double tempo de « Afterglow », qui fait semblant d’offrir une bouffée d’oxygène ; un passage jazzy bien intégré achève de faire de ce titre une pierre angulaire de l’album. Autre titre phare, « Living On The Edge », presque tout droit issu de la période « Sirens », cinq minutes de cavalcade insensée où la rythmique assure sans faille l’oppression que nous méritons.
La vraie bouffée d’air vient enfin avec « Looking For Nothing ». J’ai lu que c’était un des titres préférés de Jon Oliva, ce n’est pas le mien, mais un peu de respiration fait du bien, d’autant que la suite contient du lourd. Comme dans un cauchemar, dont on se croit évadé, les égrégores viennent vous reprendre et « Evil Within » y arrive parfaitement. Le long « Winter Heaven » est la petite déception de l’album, le crescendo que l’on attend impitoyable se fait attendre, et la voix de Jon offre certaines de ses limites. C’est bien, mais en sept minutes, Jon nous a appris à en dire plus. Et ce n’est même pas fini, « I Fear You » matraque encore et encore, puis Jon Oliva nous offre peut-être sa plus belle ballade, en tout cas gorgée de sensibilité, avec « Now ».
"Festival" est un album aux propos concis, variés, précis, cohérents, le genre de galette qui s’écoute d’une traite et sur laquelle on revient rapidement. Chaque titre fait à la fois déjà entendu, puis offre progressivement sa complexité, un riff surprise, des claviers inattendus, des choeurs ou des soli accrocheurs. Un très bon opus qui devrait ravir les fans d’Oliva voire ceux de Savatage...