Une fois sa carrière lancée Sonata Arctica ne perd pas de temps. Comme pour bien occuper le terrain et enfoncer le clou, son deuxième album est écrit rapidement et sort à peine plus d’un an après "Ecliptica". De plus dans l’intervalle le groupe a pris le temps de sortir un EP, "Successor", avec des reprises, des titres live et des inédits. "Silence" est déjà très important pour la carrière du jeune groupe au sein d’une scène speed métal mélodique qui commence à montrer des signes d’essoufflements. Et alors que nous aurions pu nous attendre, étant donné les délais de réalisation, au petit frère d’"Ecliptica", il n’en est rien, bien au contraire. "Silence" est un album plus long et plus mûr. L’aspect frais et un peu naïf s’est estompé, de même que l’aspect copie carbone de Stratovarius, et alors qu'il garde le sceau du speed métal mélodique, cet album est avant tout très varié.
Sonata Arctica crée doucement son style avec alternances entre titres assez rapides, titres plus modérés, ballades et passages plus longs aux limites du progressif. Bien sûr, il y a des longueurs dans ce long ensemble de 13 titres pour plus d’une heure de musique, mais ceci semble s'expliquer par le fait que le groupe se cherche un peu et hésite encore sur la meilleure voie à prendre, donnant ainsi des titres plus dispensables. Malgré ses défauts, "Silence" reste plus que sympathique avec plusieurs moments de bravoure et quelques grands titres. Techniquement, le groupe a franchi un pas de géant avec un Tony Kakko au chant qui s’affirme encore plus comme un grand chanteur, capable de moduler sa voix à merveille sans devoir se cantonner dans un registre purement speed métal.
Plusieurs titres sortent donc du lot. Il y a bien sur les titres très rapides comme "Weballergy", "Black Sheep", ou encore "San Sebastian" et "Wolf And Raven". Ces morceaux montrent que Sonata Arctica sait pondre des hymnes de speed métal mélodique simples, forts, personnels et facilement mémorisables avec un excellent niveau musical, les parties de claviers et les soli de guitares étant efficaces et précis.
Nous trouvons également des titres plus soft, à la fois rapides et posés, comme l’excellent "False News Travel Fast" et sa belle introduction, avant qu’un ton énergique ne nous entraîne, mais toujours avec un chant plus calme, presque mélancolique, donnant une grande force à ce titre. C’est aussi le cas du très beau "Sing In Silence" qui montre un chant plus grave et un ton musical plus soft, assez hard rock dans l’esprit.
Enfin, nous nous attarderons sur les titres plus progressifs tels que "The End Of This Chapter", et surtout "The Power Of One". Le premier mêle piano et belles mélodies de guitares, le tout avec une lente montée en puissance qui donne un excellent résultat tout en mélancolie et en finesse grâce à un chant encore très maîtrisé. Le second suit le même schéma avec une touche d’émotion en plus dans la voix de Kakko, ainsi qu'un mélange entre métal, progressif, ambiances sombres et piano qui montre un groupe déjà très mature et sûr de lui.
Cependant, il est à déplorer quelques faiblesses, comme l’instrumental "Revontulet", un peu inutile et trop démonstratif, et les deux ballades, "Tallulah" et "Last Drop Falls", qui coupent le rythme de l’album et sont trop classiques même si elles servent surtout à mettre Kakko en évidence. Enfin le rapide "Land Of The Free" n’apporte rien de plus dans le genre par rapports aux autres très bons titres speed de l’album.
"Silence" est donc un disque de transition pour Sonata Arctica qui a vite voulu prendre son envol avec sa personnalité propre. Nous oublierons vite ses défauts pour assister à l’émergence d’un grand nom de la scène métallique doté d’un potentiel énorme. Et si ce disque est parfois un peu mis de côté dans la discographie du groupe, il mérite amplement que l’on s’y attarde tant il représente un pont entre deux vies du groupe.