D’après mes souvenirs, RC2 était le seul groupe de rock progressif à avoir la particularité de provenir du Venezuela, pays plus connu pour son facétieux président que pour ses groupes de rock. Il faudra désormais compter avec une autre formation de rock progressif, Echoes, dont le nom ne sent pas spécialement le folklore vénézuélien.
Ce groupe est formé de six musiciens sans vocaliste attitré mais avec trois guitaristes complémentaires. Nature-Existence n’est pourtant pas un album purement instrumental car Echoes est allé chercher plusieurs chanteurs issus de différents groupes pour tenir ce rôle. La signature chez ProgRock Records est une véritable opportunité pour un premier album tout en étant le gage d’une certaine qualité. Avant d’entendre les premières notes de cette œuvre, dont je vous avoue déjà qu’elle n’a pas été simple à aborder, beaucoup de signes avant-coureurs m'auront mis donc l’eau à la bouche. Parmi les recrues spécialement invitées pour cet album citons Nick Storr de The Third Ending et Tobias Jansson de Silent Scythe au chant, Dave Duffus de Winds of Dread au saxophone et un quartet de cordes pour l’ambiance.
Etonnante manière de débuter un album que celle choisie par les vénézuéliens. « Epilogue » nous offre une courte mise en bouche instrumentale qui surprend plus par son appellation que par son style. On y entend un instrument traditionnel qui ressemble à du luth, mais hormis cela on se place sur un terrain très familier de hard-rock progressif très énergique qui prend le temps de son développement. Les trois premiers morceaux s’imbriquent pour former un ensemble cohérent d’une quinzaine de minutes. Autant vous dire tout de suite que les choses sérieuses commencent d’emblée avec Nature-Existence. Les premiers accords de piano de « Rude Awakening » résonnent et le charme opère. Le chanteur est parfait dans le registre intimiste et excellent quand la saturation déboule. On pense souvent à Vanden Plas ou bien à la maîtrise de feu Sieges Even, dans le refrain de « Leaf Motif » notamment. Tout au long de ces deux morceaux les harmonies sont lumineuses et de courtes dissonances donnent une couleur sombre qui prend aux tripes. Les ambiances sont parfaitement amenées et les accélérations sont idéales.
Quand Echoes décide de faire dans le métal progressif, c’est le meilleur de Dream Theater qui vient à l’esprit avec les épiques instrumentales « Lullaby » et « Bonfires ». Les autres morceaux s’enchainent avec toujours autant de bonheur même si l’épaisseur des compositions amène une difficulté de taille. Nature-Existence est un de ces albums exigeants qui demande de la persévérance avant d’être percé. Et la succession de chanteurs, si elle est un véritable apport dans la diversité, brouille encore un peu plus les pistes.
Pour un premier album, Echoes démontre un savoir-faire progressif époustouflant : mariage de structures rythmiques et apport d’un saxophone salvateur dans « Despair », qualité et diversité des ambiances alliées à la moiteur d’un chant langoureux pour « Winds Of Dread » ou symphonie et quiétude pour « Farewell ».
Sans vraiment s’en rendre compte c’est déjà le « Prologue » qui sonne, comme pour mieux inviter à se repasser l’album. Les premières écoutes du disque convainquent que l’on tient là un disque prometteur. Les suivantes vous entrainent irrémédiablement dans un maelstrom dont vous aurez du mal à vous défaire.
Le seul reproche que l’on fera à Echoes est de ne pas nous faire assez voyager comme peuvent le faire un Angra ou un Orphaned Land. Personnellement, en traversant l’Atlantique j’aurais aimé franchir la mer des caraïbes plutôt que de me retrouver nez à nez avec la statue de la liberté. Hormis cette légère frustration Nature-Existence m’a procuré de nombreuses heures de plaisir progressif. Il m’aura fallu pourtant beaucoup plus de tentatives que d’accoutumé pour enfin arriver à transformer une mélodie en souvenir. Le disque n’est pas spécialement long mais il se révèle être au final très dense.
Un constat s’impose, le Venezuela a une fâcheuse tendance à produire de sacrés bons groupes de rock progressif (même s‘ils ne sont que deux pour l‘instant!). Le dosage instrumentales-chansons est une vraie réussite car il permet de contenter toutes les attentes de l’amateur de hard progressif. La créativité de Echoes achève de rendre cet album passionnant...