Bosch’s With You est le projet atteignant l’âge de raison de la moscovite Dima T. Pilot et dont « Wired Promise to be » sera malheureusement sans doute le dernier témoignage. Disparue au début de l’année 2009, la jeune multi-instrumentiste aura eu tout de même le temps de mettre sur bande cet objet post-rock instrumental de l’écurie R.A.I.G, pendant soviétique des œuvres de Mogwai, Explosion In The Sky ou des français de Kwoon.
Des baleines bleues flottant dans les airs en guise de décor, danse féerique au dessus de nos têtes, le quartet se fait, grâce à cet univers imaginaire qu’il semble s’être créé depuis l’origine, le guide d’un voyage presque chimérique, et dont la douceur et la rêverie mènent les rênes. S’appliquant à ne pas déborder du sillon tracé par les pointures du genre mais avec un savoir-faire sans conteste, Bosch’s With You fait planer durant plus d’une heure une atmosphère cotonneuse, tranquillisante, sans sursaut. Ce qui ne veut pas dire que les thèmes abordés ne provoquent pas le moindre éclat d’émoi ; certains passages, plus poignant font même naître une émotion plus distincte.
Ceci dit, l’effet provoqué tient plus de la béatitude et de la contemplation exacerbée par la longueur des morceaux – deux d’entre eux tournant autour des vingt minutes. Bosch’s With You prend son temps pour faire vivre son récit, maintenant à quelques endroits un état hypnotique par la répétition des motifs. La formation russe n’a pas l'intention de brusquer, que ce soit par ces arpèges de guitare répondant à un flot presque permanent de double-croches ou encore par ce toucher léger de batterie. La recherche est ailleurs, aux sources même du genre, où la musique se suffit à elle-même pour expliquer les choses ou au moins pour traduire certaines émotions. Le dernier titre « Metathesis », à l’évidence même, possède les meilleurs arguments en ce sens : sorte de longue bande son sur fond de morceaux de vie où instruments, bruits, et voix lointaines se mélangent harmonieusement. Cette diapositive sonore annihile avec le temps toute forme de tourment.
La formation russe ne survivra sans doute pas à la perte de leur élément moteur, mais elle aura accouché une ultime fois d’une abstraction belle et reposante.