Le prog' américain, c'est pas toujours très convaincant. Pour trouver un son original, créatif, et décadent outre-atlantique, il vaut mieux se tourner vers tout ce qui touche au jazz.
Chick Corea, c'est avant tout un jazzman émérite, disciple de Miles Davies et frère d'armes d'Herbie Hancock (d'ailleurs présent sur cet album). Mais Chick Corea est aussi l'un des pionniers du Jazz Rock, dit aussi Free Jazz ou Rock Progressif (les nuances sont subtiles et intéresseront surtout les fans de jazz). Avec cet album, il invente l'album-concept de jazz, et mélange à loisir toutes les sonorités dans un état d'esprit d'absolu éclectisme et d'inspiration débridée.
"The Mad Hatter" doit son concept à Alice au pays des merveilles, une référence qui fit des émules chez les anglais avant de toucher un américain. Pour Chick Corea, l'expérience hallucinatoire de la petite victorienne se traduit par une section de cuivres virtuoses, par une batterie et une contrebasse au sommet de leur groove, et par des solos de claviers complètement dingues. Chick Corea sait tout faire avec un piano : des envolées romantiques, des solos jazzy, des expérimentations de la mort. Et il touche aussi des synthés jamais tournés vers l'excès, mais toujours vers la créativité. Son instrument-phare, c'est le magnifique piano électrique Fender Rhodes. Ce clavier magique révélé par les jazzmen américains connaît entre ses mains et celles de son ami Herbie Hancock des moments de gloire inoubliables.
On retiendra surtout "The mad hatter rhapsody" et "falling Alice", deux titres qui touchent à l'absolu synthèse jazz et rock. Mais l'ensemble de l'album est un hymne à la réconciliation de deux genres pas si antinomiques qu'il n'y paraît.