Après un « Dragon's Kiss » typiquement métal Marty Friedman prend ici tout le monde à contre pied en pondant une petite merveille de mélodies et d’ambiances orientales. Bien loin du côté tape à l’œil et démonstratif de sa période Cacophony, ou du Speed de Megadeth qu’il vient alors juste de rejoindre, le guitariste se dévoile ici sous son côté le plus mature et le plus surprenant. Loin de nous inviter à Shredland le pays où on branle le manche, Marty nous convie dans un monde de douceur et de rêves.
Ainsi, dès les premières notes de la paire "Tibet / Angel", le tempo est lent et l’orchestration assez dépouillée. Inutile de chercher des parties de double grosse caisse, des riffs acérés ou une basse atomique. Vous n’aurez droit qu’à des bruitages de cloches semblant émerger de la brume, une guitare au son très clair, lorsqu’elle n’est pas tout simplement acoustique, et un clavier au son assez cheap et qui fonctionne essentiellement sous forme de nappes.
Ne croyez pas pour autant que le guitariste nous a pondu un disque de musique pour toilettes de Mc Donald. Les mélodies sont magnifiques ("Valley Of Eternity", les arrangements sonnent très justes ("Realm Of The Senses") et Friedman sait se montrer impressionnant de sensibilité, une guitare à la main ("Night"). La structure des morceaux fonctionne souvent par progression. Si l'on prend l’exemple de "West", le morceau débute doucement avec des bruitages reproduisant une ambiance de nature (eau, orage…), puis une guitare acoustique tisse une première ligne mélodique, avant d’être rejoint par un clavier très sobre dans un premier temps, puis plus présent au fur et à mesure de l’avancée du morceau. Celui-ci s’étoffe progressivement, s’enrichit pour prendre plus d’ampleur, tout en conservant le côté aérien, quasi-mystiquee qui prévalait à son début.
Il n’y a guère qu’avec le court "Trance" que Friedman renoue avec des riffs bien trempés. Ce morceau fait d’ailleurs un peu figure d’anomalie, au sein de cette palette de titres atmosphériques.
Quoiqu’il en soit l’ensemble est une réelle réussite. Le guitariste ayant mixé avec bonheur le côté céleste et mystique que l’on peut trouver dans la New-Age, avec un sens de la mélodie et une technicité impressionnante. Marty Friedman avait prouvé par le passé qu'il était un guitariste d’exception. Avec ce "Scenes", il s’impose comme un compositeur d’exception.