Soit: ils ne sont pas Américains mais Canadiens C’est tout comme pourtant ! En effet, il n’y a que les enfants de la bannière étoilée pour vidanger un tel stoner doom lourd et graisseux, et qui sent sous les bras. Avec leur gueule de barbus buveurs de bière, sorte de cousins éloignés des Mastodon, on se doute bien d’ailleurs que les mecs de Bison B.C. ne font pas dans la ballade sirupeuse ou le metalcore pour puceaux à la recherche de sensations fortes !
Deux ans après un premier essai longue durée, "Quiet Earth", de bonne mémoire, les Canadiens remettent donc le couvert pour un festin encore plus imposant, à base de heavy doom épique braillé par une gorge profonde plus sludge/hardcore que façon « je me suis coincé les glaouis dans ma braguette ». "Dark Ages" reprend les choses où les a laissé son prédécesseur tout en lui insufflant plus de profondeur.
A la croisée de plusieurs (sous) genres, lesquels ont tous en commun une lourdeur pachydermique identique, Bison B.C. sculpte dans la roche de Monument Valley des compositions dont la durée ne leur fait jamais perdre en vigueur. Propulsées par une rythmique du feu de Dieu, ces sept enclumes semblent n’être guidées que par un seul but : scotcher l’auditeur à la tapisserie.
Parfois à la limite du doom mazouté ("Fear Cave", "Wendigo Pt. 3", descente abyssale dans une mine de charbon en dépit de ses premières minutes acoustiques), menées par des harmonies très heavy-métal ("Stressed Elephant") et des soli parfois beau à en pleurer, elles érigent un mur que fissure une mélancolie certaine. Le groupe aime prendre son temps et tricoter de longues introductions (les accents orientaux du grandiose "Melody, This Is For You" qui ne démarre en réalité qu'après plusieurs minutes instrumentales de toute beauté, ou l‘énorme "Die Of Devotion", contre lequel vient se fracasser une tornade de riffs biberonnés au grand hard rock seventies).
Ceux qui préfèrent du heavy plus classique et mélodique pourront être rebutés, aussi bien par la pesanteur constante de l’ensemble, malgré quelques titres plus rapides ("Two-Day Boose" et son final très maidenien un peu maladroit du reste) que par le chant hurlé de James Gnarwell. De fait, "Dark Ages" s’adresse davantage aux mangeurs de viande grasse et velue à la High On Fire, en moins stoner et en plus doom, qui eux, trouveront matière à se décrocher le cou avec cet album en tout point supérieur à son aîné. Ce n’est pas encore parfait mais Bison B.C. est sur la bonne voie. Vivement la suite par conséquent, notamment sur scène où ce métal de mammouth doit carrément prendre toute sa démesure.