Alors que ce groupe nous avait habitués à un album tous les dix ans, il nous revient avec " The Crown Of Creation" après seulement trois petites années d’absence. Leur grand âge leur donnerait-il des ailes ? Avec ce cinquième album, le groupe norvégien voit les choses en grand et teinte son rock néoclassique des 70’s de nouvelles touches. Avec la présence sur tout l’album de l’orchestre symphonique de Kristian’s (ce dernier relègue le groupe au second plan sur de nombreux morceaux), Lucifer Was nous sert un concept album en forme d’Opéra Rock assez réussit.
Alors bien sûr, la marque de fabrique du groupe reste présente : guitare grinçante rappelant les débuts d’un certain Richie Blackmore, flûte à la Jethro Tull, mellotrons et Hammond bien heavy, et la voix unique de Jon Ruders. Mais gare à vous, cette dernière devient dans un tel contexte bien mélodramatique et pourrait rebuter certains. Ceux qui ont vu "L’étrange Noël de M.Jack" en VO auront une idée de sa prestation. Il en résulte donc cet album très grandiloquent et possédant une forte odeur de 70’s psychédéliques et fantaisistes, une sorte de "Butterfly Ball" grave et symphonique, un album hors du temps et des modes.
"Wonder" démarre cette œuvre sur un rock très classique qui ne laisse rien entrevoir de la suite. C’est un curieux "Three Hammers" à la Hitchcock qui nous plonge dans cette fable improbable. S’enchaînent ensuite des titres plus courts où bien souvent le groupe est absent, laissant l’orchestre porter deux voix (masculine et féminine) sur une trame dramatique, et d’autres plus longs, plus racés, qui laissent, après une courte introduction symphonique, place au groupe dans son ensemble, comme avait pu le faire Jon Lord sur son "Concerto For Group And Orchestra". A ce titre, le meilleur exemple est l' éponyme de presque 20 minutes, garni de superbes soli, ou "Rising Sun", une sorte de Power Métal sur lequel les guitares hurlantes et rapides auraient été remplacées par des violons. L’orgue éclate ensuite comme sur un bon vieux Heep, puis un solo de violon vient se poser sur un pseudo solo de batterie. La guitare, que l’on attendait plus, s’invite sur la fin pour l’explosion finale. Un des meilleurs titres, très osé et original.
"Into The Blue", également plus électrique, laisse la part belle à la chanteuse dont le nom n’est malheureusement pas crédité. "Cabris Sans Corne" se révèle être un superbe instrumental et « "When The Phoenix Flies" et "By A White Lace" sont certainement les plus beaux passages de cette longue œuvre mélodique.
Ne cherchez pas ici de Hard Rock ou de guitare à la pelle malgré les trois gratteux présents dans le groupe (nous compterons en tout et pour tout quatre interventions dignes de ce nom). "The Crown Of Creation" est une œuvre à part dans la discographie de Lucifer Was, mais en fait par la même un des meilleurs albums du groupe, à défaut d’être représentatif.