Pour son quatrième album en quatre années d'existence (une performance qui fait doucement sourire - ou rêver - de nos jours), Saga nous revient avec Worlds Apart, album qui doit rester à ce jour comme son plus grand succès commercial. Preuve en est, le souvenir extirpé de mon adolescence de l'écoute plus que régulière de On The Loose sur une grande radio nationale, RTL pour ne pas la nommer, à une époque où les radios dites libres n'en étaient encore qu'à leurs débuts.
Bref, après le très réussi Silent Knight, le groupe a continué d'améliorer sa recette, en changeant tout d'abord de producteur, chose étonnante à priori quand on constate la réalisation quasi-parfaite de cet album.
Mais voilà, les Canadiens n'ont pas quitté Paul Gross pour n'importe qui, puisqu'ils se sont confiés aux oreilles plus qu'expertes de LA star Rupert Hines. Et une nouvelle fois, cela fait mouche. Certes, d'aucuns pourront toujours reprocher l'aspect trop léché - pour ne pas dire trop commercial, voilà le mot qui fâche - des neuf compositions. Il n'empêche que le travail de Rupert Hines est tout bonnement parfait, notre homme ayant notamment bien remis en avant la batterie de Steve Negus, dont les sonorités prennent une nouvelle ampleur (écoutez par exemple The Interview pour vous en convaincre).
Comme ses prédécesseurs, Worlds Apart nous propose une collection de titres pour la plupart bien dynamiques, avec des mélodies incontournables et les désormais traditionnels ponts instrumentaux, avec en tête de gondole un Framed jubilatoire. Comme d'habitude, nous avons également droit à la ballade apaisante (No Regrets), mais aussi à un Ovni quasi-instrumental (Conversations, dont les "paroles" ont été coécrites par J. Crichton et M. Sadler ! … une syllabe chacun ???), et enfin à un final sublime dans une veine franchement progressive (No Stranger) qui réjouira les oreilles de ceux qui se seraient lassés (à tort) d'une orientation commerciale annoncée… et magnifiquement assumée !
Clôturant provisoirement la saga des Chapters, Worlds Apart réussit la prouesse de répondre aux contraintes commerciales exigées par un statut montant en flèche, tout en conservant une cohérence et une qualité artistiques hors-normes. Après 30 années de recul, force est de constater que Saga n'a pour le moment pas fait mieux. Mais la barre est placée si haute…