En matière de rock et autres dérivés, la Suède fait désormais partie depuis plusieurs décennies des terres fécondes. Unanimement reconnue pour avoir enfanté quelques-unes des très belles formations qui nous aident régulièrement à détendre nos cervicales trop crispées, elle apparaît toutefois comme le terreau de groupes plus rugueux que groovy, plus métal que rock. Et pourtant les trois farfadets de Revolve sont bel et bien Suédois et évoluent dans un registre hard-rock folk et bluesy. La formation n’est pas tout à fait une nouvelle venue, puisqu’il faut remonter jusqu’en 2003, d’après leur courte mais officielle biographie, pour retrouver les origines du trio à Uppsala, charmante bourgade champêtre suédoise donc, où les frères Nils et Per Tengvar, respectivement guitariste-chanteur et bassiste-claviériste ont fait leurs premières armes. Rejoint par Jarkko Kyyriäinen, que nous nommerons « le batteur » pour plus de confort linguistique, le groupe a sorti en 2008 son premier single, salué par quelques magazines nationaux spécialisés.
Voici pour la petite histoire, penchons-nous maintenant sur celle qui nous intéresse aujourd’hui : le premier album "Burning Money". Un premier album est toujours un exercice périlleux, pourrait-on affirmer sans trop se mouiller, mais derrière le lieu commun, l’affirmation a tout de même une part de vérité : les formations faisant leur grande première sont trop souvent tentées de démontrer l’étendue de leur talent sans prêter assez d’attention à la cohérence de l’ensemble, ou en négligeant quelques détails plus techniques. Malgré la belle diversité des titres proposés, Revolve parvient à délivrer un premier jet bien balancé et à la variété des styles maîtrisée.
Autre problématique insoluble des premiers albums : ils sont trop souvent très mal produits, pour cause de budget insuffisant ou d’inexpérience. Et côté prod, si Revolve a fait quelques beaux efforts, on ne peut en effet s’empêcher de déplorer un manque de netteté sur les parties les plus distordues, ainsi qu’un grain récurrent assez irritant.
Passons désormais à l’analyse des dix premiers méfaits du trio. Tout débute de manière magistrale et même un brin déstabilisante avec le monumental "Always Seem To Loose" : arpèges aériens, chant clair parfaitement en place, riff et envolées foudroyantes, structure et rythmiques solides, tout y est ! Un tout petit bémol pourrait être signalé quant à la voix moins maîtrisée sur les parties les plus agressives, mais la qualité et l’enthousiasme sont tels qu’il en faudra bien plus pour nous refroidir. L’outro typée southern conclut ce qui semble déjà être un monument du groupe et nous laisse rêveur pour la suite.
Et là, vlagadam… Alors que nous étions partis sur un hard-rock rageur et ciselé, nous retombons sur un gentil mid-tempo rock basique et linéaire à souhait. L’énergie est toujours là, mais on tombe de très (trop) haut pour être satisfait. "Hunted Down" s’annonce et nous descendons encore d’un palier, balade folk mignonne comme tout mais aussi motivante qu’un après-midi Scrabble un jour de pluie. Après avoir chuté si bas, il n'y a déjà plus grand chose à attendre de ceux que l'on s’apprêtait pourtant à porter aux nues, et ce n'est pas la suite qui nous fera vraiment changer d’avis. "Limited Mind" redonne un coup de fouet, mais "Don’t Fucking Tease Me" se pose vite en essai punk raté, n’est pas The Hives tout Suédois qui veut ! Nouvelle preuve avec un "Kicking This Rock’n’Roll Band" mi-figue mi-raisin quoique plus réjouissant. Et la fin de l’album est à l’avenant, "In You" et "Blessed By Less" s’énervant sans vraiment nous transporter, "Make It Spin" et "Broken And Bound" s’apaisant sans parvenir à nous emporter.
Difficile donc de porter un jugement définitif sur cet album, particulièrement exaltant pendant ses sept premières minutes, puis oscillant entre banal et bancal sur les titres suivants. Revolve démontre malheureusement à son insu qu’il est particulièrement difficile de bien mener un premier album de bout en bout. Encourageant donc, mais pas suffisant : reste à produire une suite !