Le visuel, ainsi que les illustrations qui décorent le livret, à l’ancienne, coloré et teinté de psychédélisme, sont un peu à l’image de ce galop d’essai de Eloa Vadaath : maladroits mais frais, personnels et non dépourvus d‘idées.
Né en 2006 et signé chez la jeune structure West Witch Records dont ils sont la première sortie, ces Italiens ont décidé d’arpenter les terres Ô combien casse-gueule de ce qu’on appelle parfois l’extrême progressif, soit un métal qui galope un peu partout et mange à tous les râteliers, death, black, prog… A cette panoplie, le groupe ajoute même une touche folklorique qui s’exprime par l’entremise de lignes de violon. Reconnaissons-lui au moins le courage de ne pas chercher à éviter les difficultés, ainsi qu'une certaine réussite qui, s’accompagne cependant de quelques maladresses. Déséquilibré, le menu souffre ainsi d'un milieu de parcours plus faible en comparaison du début et de la dernière partie, tandis que le son capturé dans un monastère, bien qu'il fasse la fierté du groupe, manque d'emphase et de puissance. Ces faiblesses ne grèvent au final pas trop le plaisir que l’on ressent à l'écoute de ce disque.
Péchant par excès d'ambition pour ne pas dire de prétention, Eloa Vadaath et son art protéiforme pourront (forcément) évoquer Opeth, le génie en moins. Néanmoins, en dépit de ces airs d’auberge espagnole où copulent chant black métal, voix claires, chœurs féminins, nappes symphoniques, breaks épiques, descentes de manche malmsteeniennes, cet album garde une étonnante limpidité quand bien même l’indigestion n’est pas toujours évitée (le néanmoins bon "64 A.D. - Le flambeau").
Les Italiens ne sont pas avares en idées, ouvrent des pistes, mélangent les genres en une symphonie chaleureuse et joyeusement bordélique ("The Navidson Record", "Uncontaminated" qui semble partir dans tous les sens malgré des fissures jouissives). Si l’on n’est parfois bien obligé de lui reprocher de vouloir trop bourrer le sac de voyage, Eloa Vadaath se déleste cependant d’une poignée de compositions à la tenue de route plus sure. Citons "Coalesce Part I : A Perverter Among The Kaïnites", "A Bare Reminiscence Of Infected Wonderlands" ou le long et terminal "Coalesce Part II", rehaussé d’arrangements soignés.
Bien qu'intéressant, A Bare Reminiscence Of Infected Wonderlands parait trop dense, et le groupe devra à l'avenir canaliser à tout prix une inspiration par trop hétéroclite s'il veut imposer son curieux patronyme. Comme il devra se doter d'une production plus ample qui rende davantage hommage à son travail. Toutefois, on a connu premier jet moins convaincant...