Ronnie James Dio n’était pas le genre d’artiste à faire patienter longuement son public. En effet, la carrière déjà bien consistante du bonhomme à la fin des années quatre-vingt en a déjà fait non seulement une valeur sûre, mais aussi et surtout une personnalité incontournable du Heavy Métal depuis son envol en solo sous le nom de Dio.
"Dream Evil", le quatrième album du nom, marquera de son sceau une période particulièrement riche et intense pour le groupe. Cet album, bien que moyennement accueilli à sa sortie, recèle quand même largement de quoi réjouir les pavillons auditifs de tout aficionado de Heavy Métal épique et bien fourni. A ce titre, la production de "Dream Evil" n’a quasiment pas vieilli, si ce n’est un mix de batterie bien en avant très en vogue dans les années quatre-vingt.
Cet opus marque cependant pour Dio le premier changement de personnel à un poste clé. Le guitariste Vivian Campbell a quitté le groupe pour embrasser, dans un premier temps, une aventure en solo sous le nom de Riverdog. Son remplaçant n’est autre que Craig Goldy, un six cordiste américain qui travailla avec Rough Cutt et Giuffria. Son style se rapproche beaucoup de celui de Ritchie Blackmore et imprime donc à "Dream Evil" un parallèle certain avec Rainbow.
Des titres comme "Sunset Superman", notamment au moment du solo, ou bien encore "When A Woman Cries" de part sa construction et ses nappes de clavier, rappellent avec justesse et vivacité les années de gloire qu’a connu Ronnie James Dio aux côtés de l’homme en noir. Le constat se justifie sur le titre éponyme dont le riff de base ressemble étrangement à celui de "Man On The Silver Mountain". Mais la force de ce chanteur exceptionnel réside dans sa capacité à concocter quelques petites perles mélodiques et prenantes, à commencer par le très touchant "All The Fools Sailed Away". Dans un registre plus radiophonique, puisqu’il sera le single extrait de cet album, "I Could Have Been A Dreamer" atteindra une place assez confortable dans les charts US.
Mais un des faits marquants et indiscutables qui fera de "Dream Evil" un cru tout à fait honorable de la saga Dio, c’est avant tout la performance réalisée par Craig Goldy. Ses riffs, ciselés et nerveux, marqueront de leur empreinte chaque moment de cette production renouant avec le Heavy claquant et mélodique qui fut la marque de fabrique de ce chanteur haut en charisme. Bien sûr, les autres musiciens se montrent entièrement à la hauteur. Jimmy Bain participe pleinement à cette osmose aux couleurs métal grâce à ses lignes de basse en fer forgé. Claude Schnell, le claviériste de studio, est dorénavant membre à part entière du groupe, sans oublier l'imposant Vinnie Appice qui fait étalage de sa puissance derrière les fûts.
Et que dire sur la performance de Dio, si ce n’est une fois de plus qu'elle constitue une véritable démonstration de force alliée à un lyrisme qui n’appartient qu’à lui. Le lutin magique est dans une forme éblouissante, comme à l’accoutumée, serait-on tenté d’ajouter sans la moindre arrière-pensée. Il n’y a qu’à simplement écouter la petite bombe "Overlove" et son intro de guitare très rock’n’roll pour déguster du grand Ronnie James Dio. Alors soit, "Dream Evil" n’a pas l’impact de l’inégalable "The Last In Line", mais fait tout de même très bonne figure dans la discographie de Dio. La magie opère et opérera toujours lorsque apparaissent les premières lignes de chant…