Il aura fallu 4 ans à la bande des frères Lill pour accoucher d'un successeur à l'excellent Christ-O, qui avait consacré un retour en grâce du quintet allemand après quelques albums en dents de scie. Parallèlement à la sortie de ce petit bijou, l'aventure Abydos, chère à Andy Kuntz, avait été adaptée en comédie musicale, réunissant alors le groupe au grand complet pour une petite merveille d'opéra rock. Puis ce fut la faillite de SPV et la débâcle subséquente d'Inside Out qui avaient compromis l'avenir immédiat de la formation. Distribué désormais par le label italien Frontiers, et après avoir patiemment pris le temps de laisser leurs esprits se purger d'une telle expérience, Vanden Plas est de retour avec The Seraphic Clockwork, un cru 2010 qui fait du bien par où il passe !
Comme pour Christ-O, c'est une nouvelle fois Andy Kuntz qui est à l'origine du thème, ayant à nouveau développé un concept-album ambitieux. The Seraphic Clockwork raconte l'histoire d'un homme vivant dans la Rome du XVIe siècle, qui tombe sous l'emprise d'une prophétie de l'Ancien Testament et est transporté en l'an 33 à Jérusalem pour être confronté au destin que Dieu lui réserve... Centré sur l'évolution psychologique de ce héros malgré lui, l'album utilise fort à propos ce contexte historique, voire mythologique, et entraîne l'auditeur dans un voyage réellement magique.
Les férus de métal progressif "à la Dream Theater" seront en terrain conquis, avec des marques de fabriques génériques qui rendent le premier contact très abordable. Cependant, Vanden Plas a depuis longtemps su exposer une personnalité bien affirmée qui gravite autour d'un duo immuable, celui de la guitare et du chant. Musicalement, c'est en effet Stephan Lill qui est à l'origine de l'essentiel des compositions, et la prédominance de ses riffs et solis, tous plus impeccables les uns que les autres, n'a d'égale que l'irréprochable performance d'Andy Kuntz, dont les lignes de chant sont tout simplement formidables, comme d'habitude. Cette paire d'artistes est au cœur des débats tout au long de l'album, se renvoyant la balle dans un duel permanent qui tient plus de l'étreinte passionnelle que de l'affrontement ; et est soutenue par une solide section rythmlque, discrète mais qui remplit son office à la perfection, et par les claviers de Gunter Werno, eux aussi plutôt en retrait dans l'ensemble mais qui percent ici et là pour quelques parties mémorables. C'est d'ailleurs à ce trio que l'on doit l'un des meilleurs moments du disque, un pont aérien, délicat et superbement groovy sur le titre "Sound of Blood".
Peut-être un poil trop long, The Seraphic Clockwork pêche par des pistes elles-mêmes un peu longues, notamment dans la deuxième moitié de l'album, où les titres épiques s'enchaînent et perdent de fait leur impact. A l'inverse, un morceau assez typé hard FM comme "Holes In the Sky", est parfaitement écrit et ferait même un single idéal. Concis et pourtant tout aussi riche que les autres, il montre qu'écrire 8 ou 10 minutes de musique n'est pas un élément sine qua non du métal progressif. Malgré la baisse de rythme et d'intérêt à l'écoute de cette deuxième partie, il serait toutefois très injuste de rester arrêté sur ces minces défauts, car si l'originalité n'est pas non plus de mise, il faut bien admettre que Vanden Plas est un groupe qui a déjà de nombreux kilomètres au compteur, et qu'il dispose d'un savoir-faire indéniable. La qualité d'écriture, d'arrangement et de production ne fera pas oublier le classicisme de l'ensemble, certes, mais voilà un concept-album tellement bien fait que l'on se laisse happer sans jamais chercher à lutter vraiment. Riffs accrocheurs, mélodies qui restent en tête, parties instrumentales techniques sans être démonstratives ("On My Way To Jerusalem"), sens du groove et mise en place impeccable... Du beau travail. Il est simplement dommage que le groupe n'ait pas transcendé l'album précédent, et se soit contenté de maintenir un même niveau de musicalité.
Dans ces conditions, la note ne peut elle-même pas excéder celle qu'avait reçu Christ-O. Saluons le travail réalisé, mais espérons que Vanden Plas trouve les ressources nécessaires à la création du chef-d'œuvre absolu qui manque encore à leur palmarès.