ALICE COOPER: Special Forces (ROCK) : avis / chronique à lire sur Music Waves

« Special Forces » peut être considéré comme le prolongement de « Flush The Fashion ». Les ingrédients restent en effet globalement les mêmes à savoir un Alice COOPER sous l’emprise de l’alcool et dont l’état physique est toujours aussi inquiétant, et une orientation musicale qui fait la part belle à la New-Wave et aux sonorités synthétiques alors en vogue. Si les composants ne varient pas vraiment, la recette ne change pas non plus avec des morceaux courts construits autour d’une base de claviers contenant des interventions de guitares mordantes, sur fond de vocaux malsains.

Mais là où « Flush The Fashion » se montrait bancal et un peu inabouti, ce treizième album d’Alice COOPER s’avère bien plus jouissif même si les évolutions sont assez minimes et essentiellement à mettre au crédit de l’ambiance. Alice semble ici tellement déjanté et malsain, les claviers tellement sombres et poisseux, qu’un morceau comme « Who Do You Think We Are », pourtant le titre le plus proche de son répertoire classique, se révèle vénéneux à souhait.

Dès « 7 & 7 Is » la folie gagne du terrain. Cette reprise du groupe LOVE (elle fut également adaptée par RUSH et les RAMONES) donne le coup d’envoi des festivités. Sur fond de sonorités synthétiques et de riffs semblant émerger des années 50, Alice s’approprie les paroles d’Arthur LEE qu’il recrache avec un phrasé des plus surprenants. Et les choses ne s’arrêtent pas là puisque « Prettiest Cop On The Block » donne l’occasion à Alice de s'adonner à son sport favori : la provocation. Dans ce morceau très aisément mémorisable, il se montre si obscur et si déroutant qu'il devient difficile d'interpréter ce texte : provocation gratuite, délire éthilique, second degré… ?

« Skeletons In The Closet » et « You Look Good In Rags » ne sont pas en reste, et marient avec bonheur efficacité musicale et textes loufoques. Alice nous balade en permanence sur le fil du rasoir, en nous laissant plus que perplexe : y a-t-il lieu de rire de ses géniales bouffonneries ou bien de s’indigner de son je-m'en-foutisme ? Les pistes sont tellement brouillées et l’on passe si rapidement du risible au brillant qu’il est bien difficile d’avoir des certitudes.

Ainsi, que penser de la présence de cette version pseudo live du titre « Generation Landslide », déjà présent sur l’album « Billion Dollar Babies » ? Ou bien de ce « Look At You Over There, Ripping The Sawdust From My Teddybear”, mentionné sur la pochette du disque mais non présent dans celui-ci ? Ce titre retiré par Alice au dernier moment ne sera édité que dans le coffret « The Life and Crimes of Alice COOPER », 18 ans plus tard.

On le voit, à l’image de sa pochette, « Special Forces » est un album déroutant et insaisissable, dans lequel un Alice COOPER à la dérive parvient encore à nous bousculer en soufflant dans nos oreilles sceptiques le chaud et le froid.

ALICE COOPER

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