Une première démo en 2004, Lueur d’une lune morte, annonciatrice d’une apocalypse à venir et puis... plus rien. Six ans plus tard, Nyseius est pourtant toujours en vie et plus haineux que jamais. Les Français ont eu raison de ne pas baisser les bras car Militiae confirme les bonnes impressions laissées par leur enregistrement séminal. La horde a mis les petits plats dans les grands pour assurer un festin morbide : la signature chez Atmf, écurie exigeante et élitiste, est un indicateur qui ne trompe d'ailleurs pas.
A première vue, Militiae s'apparente à un méfait typique de la production courante en vigueur dans la chapelle noire. Satanisme bas du front, face de goule peinturlurée à la truelle achetée cher Leroy Merlin sont les mamelles que tète un black métal cru et intense. Pourtant Nyseius mérite mieux que ces quelques clichés reflétés par une vitrine faussement banale.
La durée des compos, tutoyant souvent les neuf minutes, donne déjà un premier indice d’une plus grande originalité. Et une fois leur intimité froide et humide déflorée, ces convulsions livrent alors leur pure et véritable essence. Coincées entre deux instrumentaux, celles-ci n’empruntent jamais la direction attendue. "Militia" tout d'abord, tendue comme un string, taille des lambeaux sinistres à la vitesse d’un torrent en crue. L'espace est étouffant et empli d’un fiel vicieux puis, tout en maintenant une pression démoniaque, le titre ralentit en milieu de parcours pour perforer dans la terre un caveau malsain, les relents militaires de la batterie lui conférant une armature martiale. La décélération se poursuit, entrainant "Militiae" dans des arcanes qu'aucune lueur d'espoir ne vient éclairer. Les ultimes mesures sont superbes.
De même "Les symboles de la catharsis" démarre sur des blasts épiques mangeurs de territoires, avant que des modelés plus lourds et suintant une engeance malfaisante s'imposent. On lui préfèrera néanmoins "Lueur d'une lune morte" où les guitares cisaillent comme des scalpels des ouvertures d’une lugubre luxuriance.
Brutal et rapide, fiévreux et étouffant tel des coups de boutoir répétés jusqu'à l’épuisement, chaque titre creuse malheureusement un sillon plus ou moins identique. L'architecture est la même, hormis peut-être le temps d’un "Endless March" aux contours plus diversifiés avec son chant profond qui survient tout à coup et ses breaks saignants qui déchirent une colonne vertébrale du coup plus intéressante, rehaussée d’un final suspendu au-dessus d’un gouffre noir épique et glacial.
Voilà donc un blasphème parfait pour brûler quelques églises. Dommage qu’en dépit de qualités réelles d’écriture et d'un sens des ambiances mornes et glauques à souhait, le groupe n'aille pas au bout de son ambition. Militiae aurait pu être plus grand encore et se parer d'une dimension quasi lovecraftienne.