Sous ses abords à faire peur aux vieilles dames et à quelques bigots biens pesants, le metalleux a un cœur gros comme ça. Et il est nostalgique en plus ! Quand il n’exalte pas le death metal baveux à la suédoise, quand il n’honore pas le bon vieux heavy metal des familles façon premiers Iron Maiden, il se dit que, finalement, le thrash metal des années 80, époque bénie où il était encore en train de batifoler dans le bac à sable de la maternelle, c’était bien aussi.
Ainsi, il n’est peut-être âgé que de dix ans mais cela n’empêche pas par exemple Angelus Apatrida d’avoir déjà trois galettes à son actif, dont ce Clockwork qui convoque avec bonheur les grandes heures des Megadeth (référence évidente sur "Clockwork" où le chanteur déroule un phrasé à la Dave Mustaine des grands jours), Exodus, Overkill et toute la Bay Area d’une manière générale.
A son écoute, on comprend rapidement pourquoi le puissant Century Media, l’œil toujours rivé sur le tiroir-caisse, a jeté son dévolu sur cette modeste bande qui ne le restera peut-être pas (plus) très longtemps. S’ils n’ont pas poussé l’hommage jusqu’à adopter une pochette façon Ed Repka, l’illustrateur emblématique de toute la vague speed thrash des eighties dont le travail est à lui seul un indice pratique quant au contenu des albums qu’il habille, il n’en demeure pas moins que ces petits gars abattent le petit bois et récitent leur leçon bien apprise avec conviction et une apparente sincérité.
Sans être trop vintage, la prise de son conserve une pellicule assez brute, fuselage qui confère toute l’énergie nécessaire à un métal lourd et implacable. Impeccable également. Assez courts, vigoureux, les titres respectent à la règle les invariants du genre : voix nerveuse, rythmique de bûcherons en colère, breaks, soli ravageurs… A l’Ouest, rien de nouveau sans doute mais ce n’est pas ce qu’on attend forcément de ce genre d’albums et de plus, Angelus Apatrida est détenteur d’un petit charme à l’européenne, d’une sensibilité qui, quoi que l’on fasse, n’est pas tout à fait la même que celle d'Outre-Atlantique, qui lui permettent de se démarquer un tant soit peu de toutes les autres hordes de jeunes thrasheurs nostalgiques aux dents longues.
Avec des bombes rapides et tendues comme le foc d’un navire de l’acabit de "My Insanity", "Blast Off", le très Exodus "One Side One War", "Of Men And Tyrants" ou "The Misanthropist", pour n’en citer que quelques-unes unes, Clockwork en a suffisamment sous le capot, dont également une petite reprise survitaminée de Maiden, "Be Quick Or Be Dead", ce qui fait toujours son petit effet, pour que ce disque soit l’assurance de passer un très bon moment.
Les Espagnols accouchent au final de leur effort le plus convaincant à ce jour, lequel, compte tenu d'une plus grande exposition apportée par Century Media, devrait enfin offrir au groupe une reconnaissance plus vaste et méritée.