« Les mots sont la plus puissante drogue utilisée par l'humanité ». Voilà une citation de Rudyard Kipling qui sied à ce jeune groupe parisien. Contreband à simplement décidé de les diffuser par le biais de la musique. Premier véritable album du groupe, mêlant à de nouveaux titres des anciennes productions de 2004 et 2007, « Le Cauchemar De Kipling » représente à ce jour tous les visages de Contreband. De la musique de rue en passant par le rock, la chanson française engagée, certains éléments folks, la nouvelle scène et la plus ancienne, l’album retrace son parcours.
Le groupe nous fait ici partager ses premières aspirations, ses premiers concerts à travers 13 titres aux allures de tranches de vie. Et je dois personnellement avouer qu’à l’écoute du premier titre, j’ai eu quelques craintes. En effet, « Chloé », un titre sympathique au demeurant (surtout par sa légère mélodie de guitare/basse), sent le single facile et qui catalogue faussement Contreband dans un genre "Un Nouveau Louise Attaque Pour Les Jeunes AdUlescents Qui Veulent Rester Dans Le Coup". Tout y est jusqu’au petit effet de micro en fin de refrain.
Mais le groupe ne se limite pas à cela et prouve dès le titre suivant qu’il peut aussi donner dans un rock plus lourd à l’image de la distorsion limite Noir Désir d’un « Samedi Soir » doté d’un passage tout en retenue et aux nuances agréables. La voix de JM passe mieux dans ce registre plus puissant et le groupe a l’intelligence de ne pas laisser éclater de nouveau le morceau sur la fin.
La suite est un sympathique mélange de ces genres, avec ses bons et moins bons moments. Dans les meilleurs, on retrouve la jolie mélodie d’un « Marchand De Bonheur » au texte habile, le lumineux et nostalgique « Un, Deux, Trois » (sans doute le meilleur moment de l’album), un « Bienvenue à Pattaya » que n’aurait par renié un Renaud à ses débuts et qu’une guitare grinçante vient mettre au goût du jour. Le titre éponyme, aux paroles prenantes et à la structure très complète, fait quant à lui allure de tour de force. Le groupe y abat un bien beau travail de mise en ambiance qu’il serait judicieux de renouveler à l’avenir pour donner du corps et une touche particulière à sa musique.
Le registre plus rock est représenté par un « Schizo » agréablement psychotique et riche en gimmicks de guitare et, entre autres, des titres comme « Visionnaires » et « Fanny » (garni de quelques hurlements). Le groupe se présente ici un peu maladroit. Les riffs sont assez flottants, pas toujours bien mis en valeur d’un point de vue sonore et manquent de puissance, comme s’ils n’étaient pas totalement assumés. Ces titres perdent malheureusement en conviction à l’image d’un pourtant agréable « Alcoolisé », dont le bon riff emprunte au Heavy Metal.
Voilà un groupe qui sait sans aucun doute, par sa musique et ses thèmes abordés, parler à sa génération, et va lui plaire. Pour toucher ensuite un public plus large, plus mûr aussi, il possède de bonnes bases et en affirmant un style encore plus personnel et assumé à l’avenir, il pourrait bien y parvenir. C’est tout le mal qu’on leur souhaite...