Un peu plus d’un an après la sortie du dernier Nemo, Barbares, Jean-Pierre Louveton nous revient avec un nouveau projet intitulé Wolfspring. Deux particularités à cet album : le style qui met clairement la musique progressive à l’honneur avec une orientation plus métal et le chant, qui cette fois est en anglais.
JPL s’est entouré pour l’occasion de son compère claviériste de Nemo Guillaume Fontaine, du chanteur allemand Julian Clemens et du batteur Ludovic Morot-Sibilot.
Retrouver la colonne vertébrale de Nemo dans un disque anglophone, n’est-ce pas une hérésie notamment dans le fait que JPL se soit toujours gardé de succomber à la tendance, que beaucoup conseillaient au groupe pour avoir une stature plus internationale ?
En tout cas, anglais ou français, JPL n’a pas perdu sa verve et quelque soit la langue choisie un message intelligent le restera et c’est clairement le cas des textes du disque qui se veulent une analyse lucide et effrayante de la société « en chute de par son avidité ». « 24/7 » et « Our New Mediaevil World » sont dans cette veine. JPL passe en revue autant la société de l’argent à la forte visibilité en ces temps de crises que la société des médias. Il vous faudra un peu plus de patience pour comprendre les textes que s’ils avaient été en français mais ils méritent une lecture attentive.
Concernant la musique c’est un son plus puissant que celui de Nemo qui est choisi pour ce disque car plus orienté métal progressif. On retrouve beaucoup de séquences acoustiques qui font un pont évident avec la musique de Nemo (les débuts de « The Haunting » et « Train’s Gone ») et en cela les fans de Nemo seront fortement intéressés par ce projet. Wolfspring dévoile aussi un côté symphonique très bien déployé au sein des compositions. Elles s’expriment lors de cassures ou de changements d’ambiance comme par exemple sur « 24/7 ».
Les parties instrumentales sont nombreuses, dans lesquelles les soli de JP se font plus musclés qu’avec son autre groupe, allant jusqu’à faire penser au toucher passé de John Petrucci (« Carpathian Wolves »). La grande qualité des musiques est constante tout au long de l’album et Wolfspring montre un talent particulier sur les deux instrumentales du disque. Dans deux registres assez différents, « Carpathian Wolves » et « Howling With The Banshee » sont deux réussites. La première dans un registre classique de métal progressif d’obédience Dream Theaterienne avec quelques sonorités glauques que l’on rapprocherait d’un Beyond Twilght et la seconde plus apparentée à du Nemo avec un côté épique qui tranche par rapport à la quiétude qui y règne.
Parmi les morceaux qui sortent légèrement du lot on citera l’atypique « Mutation » qui fait penser au Conception de Flow et « Our New MediaEvil World » dont le couplet-refrain sonne comme un bon vieux heavy du siècle dernier. Les douze minutes de ce dernier morceau ramassent le meilleur de Wolfspring : parties atmosphériques coutumières du travail de JPL, chants variés, textes de qualité et intermèdes instrumentaux énergiques.
Wolfspring est un excellent album qui explore des territoires plus vastes que Nemo tout en lui restant fidèle sur de nombreux points. Une des belles satisfactions reste le chant, aussi bien au niveau des harmonies que des textes. Les critiques que pouvaient avancer certains sur le travail vocal de Nemo sont sans fondement ici. Julian Clemens s’en sort parfaitement aussi bien dans des registres puissants que sur les ambiances plus posées (un bon condensé de la qualité vocale de Julian sur « Our New MediaEvil World »).
On ne sait pas quelles étaient les intentions de JPL et Guillaume Fontaine lors de la décision de passer à la langue anglaise : artistique ou reconnaissance internationale. Dans le premier cas c’est une franche réussite. Dans le second, tous les arguments sont là pour permettre à Wolfspring d’exploser à la face du monde.