Adam Lassa, ce nom vous dit quelque chose ? Et Abraxas, pas plus ? Pour ceux qui ont répondu non aux 2 questions, il est urgent de se repencher sur les années 90 et la vague néo-progressive qui s’est abattue sur la France avec des groupes comme Collage, Quidam ou… Abraxas. Pour ce dernier, leur fait d’armes français fut de jouer (sous la pluie) au Festival de Corbigny (j’y étais) en 1998. De très bons moments inoubliables qui reviennent à la surface avec Ananke puisque dès les premières secondes la voix charismatique et théâtrale du chanteur Adam Lassa fait son office.
A vrai dire cette voix particulière ne permet qu’un choix binaire, aimer ou pas, d’autant plus que celui-ci ne s’exprime que dans sa langue natale. Pour parler de la musique à proprement dite, elle se situe dans une mouvance rock où guitare/basse et claviers se partagent la bande passante d’une manière équitable. La relative petite durée des morceaux - seuls 2 titres dépassent les 5 minutes - ne permettent pas de longs développements classant donc le propos du groupe dans un progressif léger concis et précis.
Le mix est parfait et positionne même la voix d’Adam comme un soutien de fort belle facture aux musiciens qui jouent juste. Le rythme mid-tempo de Amidalla (le plus court de l’album) est à lui seul l’exemple du talent du chanteur puisqu’il transporte avec lui le combo tout entier. Perfumy –sur un rythme toujours aussi lent - basse et piano en têtes de gondole, est l’offrande ultime offerte pour magnifier alors la voix qui reste l’attrait majeure. L’ombre d’Abraxas plane tout de même sur cet opus avec Asy, le morceau le plus long de la galette (plus de 7 minutes), qui emporte l’auditeur 15 ans en arrière avec ses tiroirs qui s’ouvrent et se referment accompagnés par une guitare en mal de solis.
Le fin du fin est le titre final (Mojra) qui ravira les amateurs du Gazpacho de "Night" car sur une lenteur à freiner les escargots Ananke développe une montée progressive vers les sommets du rock atmosphérique digne d’une récompense aux Progs d’or si ceux-ci existaient. Mais, car il y a un mais, la limite d’activité du groupe se révèle avec Mayday ou Wstyd, plages un peu plus « rentre-dedans » qui peinent à combler la barrière de la langue.
Pour un premier album, Ananke tape tout de même dans la cible et pas très loin du centre. Une première offrande foncièrement positive et globalement encourageante pour ce diable d’Adam Lassa et ses acolytes dans la droite lignée d’Abraxas une dizaine d’années auparavant.