En quelques années à peine, Whitechapel s’est imposé comme un des plus violents - et donc un des meilleurs aussi - artisans du Deathcore, étiquette, une de plus, dont on se demande tout de même à quoi elle peut bien servir si ne c’est définir une musique qui tète tout simplement les mamelles du métal de la mort que l’on a pimenté d’une louche de hardcore, pour le chant en colère régurgité par un mec qui dégueule ses tripes à chaque parole prononcée. De toute façon, le fait d'avoir choisi pour patronyme le quartier où sévissait Jack l’Eventreur en dit plus long sur ce groupe que tous les discours. Bref, c’est du lourd, du méchant, du jamais content, du qui blaste tout du long sans la moindre accalmie.
Pour autant, avec son troisième méfait, produit par Jason Suecoff, un des techniciens les plus demandés dans le genre et accessoirement aussi guitariste chez Charred Walls Of The Damned, montre un groupe certes toujours aussi énervé ("Breeding Violence") mais néanmoins soucieux, sinon de rendre son métal plus accessible, au moins de le diversifier davantage tout en conservant une certaine unité.
Après un début en trombe avec trois scalpels pour fouailler les chairs ("Devolver"…), manière pour les Américains de livrer en pâture à ses fans ce qu’ils attendent d’eux, à partir "Reprogrammed To Hate" (sur lequel Chino Moreno des Deftones vient gueuler), ils trempent leurs compositions ramassées, basées sur une épaisse stratification érigée par trois guitares (!), dans des atours plus intéressants, à l’image de ce solo salvateur qui apporte une bouffée d’oxygène à ce martelage ininterrompu. De même, "End Of Flesh" se voit zébré d’éclairs un peu hispanisants tandis que lors de son final, il adopte une armature ultra heavy, tout comme "Unnerving" qui lui succède. Autres exemples, coincé entre deux déflagrations organiques, de cet effort mélodique avec "Prayer Of Mockery" que laminent de multiples fractures et des riffs chargés d’une belle tristesse, ainsi que le terminal et noir "Single File To Dehumanization".
Le sextette réussit le tour de force d’accoucher de morceaux à l'intensité rentrée ("A Future Corrupt"), s'arc-boutant sur un maillage très dense en cela qu’ils condensent en trois ou quatre minutes une masse d’informations et de notes aux allures overdose. Il va sans dire que l’on sort de l’écoute de ce A New Era Of Corrupution, exsangue et vidé, en dépit des parcimonieuses et réussies tentatives de Whitechapel pour dompter son Deathcore rageur, technique et brutal. Ce faisant, les Américains confirment leur maîtrise du genre.
Sans doute pas du pur death metal pour les intégristes, mais le jeune mécheux sans référence qui recherche une montée d’adrénaline se moque pas mal de ce (faux) débat. Whitechapel lui offre ce qu’il veut. C’est bien là l’essentiel…