Seulement trois ans pour se remettre du chef d’œuvre Fire Garden et le new-yorkais Steve Vai revient avec un nouvel album, The Ultra Zone. Entre temps Steve n’a pas chômé avec une tournée inaugurale du G3 en compagnie de Joe Satriani et Eric Johnson, un album de reprise de thèmes de noël Merry Axemas et l’édition de raretés sous le nom Flex-Able Leftovers. Autre élément important de cette période, Joe Satriani, le mentor de Vai, va orienter ses compositions en y incorporant de nombreuses machines et programmations. Cela débutera avec Crystal Planet en 1998 et en plus abouti avec Engines of Creation en 2000. On connait l’influence que Joe Satriani a toujours eu sur Vai et celui-ci ne peut pas rester hermétique à la nouvelle vision musicale de Satch.
Comme Fire Garden, The Ultra Zone est divisé en deux parties, une instrumentale et une chantée. Moins épique que son prédécesseur, The Ultra Zone est un bon compromis du travail de Steve Vai des dix dernières années. Souvent mis de côté par les puristes, cet album mérite pourtant que l’on s’y intéresse car de bons morceaux y sont proposés.
On trouve une douce atmosphère toute nippone sur le premier titre « The Blood & Tears » qui donne une vraie fraicheur quand retentissent les chants. On aura le même sentiment avec le dernier titre « Asian Sky ». Les machines font leur apparition dès « The Ultra Zone » et le rendu est plus que satisfaisant. On préfère largement quand ce sont Mike Mangini ou Robin Dimaggio aux baguettes mais la mode étant ce qu’elle est à cette époque, la batterie programmée passe bien. D’ailleurs cette instrumentale est très influencée par les productions de Satch de l’époque. On ressent tout de même un manque de créativité et de prise de risque qui alourdissent le morceau dans sa deuxième moitié.
Vai propose du léger avec « Oooo » qui ne vaut que pour sa démonstration technique et son côté « je fais parler ma guitare ». Viennent les morceaux hommages à deux grands guitaristes aimés de Steve, Frank Zappa et Stevie Ray Vaughan. Le premier pour l’instrumentale « Frank » (et dans un certain sens « Lucky Charms » qui nous renvoie à l’album Flex-Able) et le second pour la funky et entrainante «Jibboom » sur laquelle Mike Mangini se régale.
Vai nous dévoilait une facette inattendue de sa personnalité artistique dans Fire Garden, en tant que chanteur, avec des compositions souvent très mélodieuses et parfois progressives. Il enfonce le clou avec une meilleure habileté au chant sur quelques titres marquants. « Voodoo Acid » est psychédélique à souhait et Vai y incorpore des intonations envoutantes. Vai sacrifie à la ballade chantée qui vient seconder la célèbre ballade instrumentale en septième position dans les albums. « I’ll Be Around » n’arrive pas à la cheville de l’excellente « The Silent Within » même si on sent beaucoup de sincérité dans les paroles et « Windows To The Soul » est le morceau numéro sept parfaitement calibré. L’album s’achève sur un « Here I Am » blues-funk et « Asian Sky » qui fait écho au premier titre.
The Ultra Zone est un disque moins technique qu’à l’accoutumée mais avec plus de légèreté et c’est aussi l’occasion de rendre quelques hommages à des musiciens qui ont comptés pour Steve Vai. On sent l’italo-américain plus appliqué au niveau des chants, et on sait qu’il s’est beaucoup attaché à pouvoir jouer de la guitare et chanter en même temps. Il n’arrivera pas à pousser aussi loin l’expérimentation que Satriani avec les machines mais sa tentative n’est pas désastreuse. Mis à part « Oooo », « Jibboom » et « Blood & Tears », peu de morceaux de cet album seront repris en concert.
The Ultra Zone, malgré le bonheur d’entendre la folie géniale de cet artiste unique, représente l’album le plus faible de la discographie de Steve Vai. Un an plus tard il sortira un album de compilations des morceaux numéro sept ainsi qu’une Jewel Box censée contenir plusieurs albums de raretés et des rééditions. Il faudra attendre 2005 pour entendre un nouvel album original.