Si certains doutaient encore des intentions de Saxon concernant le marché US, leurs derniers doutes seront vite dissipés. Tout d'abord, le quintet britannique change complètement d'imagerie et la pochette de ce nouvel opus intitulé "Innocence Is No Excuse" tranche avec les aigles métalliques et autres guerriers auxquels Saxon nous avait habitués auparavant. Il faut vraiment voir le logo du combo pour se convaincre qu'il ne s'agit pas d'un album de Bon Jovi ou d'un autre leader de la scène Aor / FM américaine. Vous rajoutez à cela que la production a été confiée à Simon Hanhart qui a trempé dans des projets aussi différents que commerciaux, et vous ne pouvez plus vous faire d'illusions sur le contenu de cette nouvelle galette.
Cependant, plusieurs titres permettent à un ensemble, pourtant aseptisé et gâché par des claviers inutiles et une batterie aux sonorités parfois électroniques, de s'en sortir malgré tout avec les honneurs. Car ce ne sont pas les qualités de composition de Byff et sa bande qui sont à remettre en question, même si des "Gonna Shout" et autres "Everybody Up" sont beaucoup trop simplistes pour garder leur crédibilité. "Innocence Is No Excuse" comporte même quelques perles comme l'introductif "Rockin' Again" et son refrain hymnique, ou ce "Rock & Roll Gypsy" au riff hyper accrocheur. Dommage que ce dernier soit entaché d'un faux-live inutile avant son pourtant excellent solo. Et que dire d'un "Devil Rides Out" sur lequel la prestation de Byff vient rattraper cette satané production qui empêche ce titre de prendre toute son envergure, de la même manière qu'un "Raise Some Hell" au break d'après-solo un peu too much avec ses chœurs faussement virils ? Tout simplement qu'il s'agit de très bons titres malgré ces handicaps inhérents à cette volonté non maîtrisée de toucher le marché nord-américain.
Voilà une obsession qui est à déplorer et qui va entraîner un sentiment de trahison chez de nombreux fans alors que les bases restent bonnes, comme le prouve un "Give It Everything You've Got" qui conclut l'ensemble sur les chapeaux de roue et en ferait presque oublier les errements qui le précèdent. En effet, un "Call Of The Wild" ou un "Back On The Streets", dotés de refrains et de riffs efficaces, auraient fait office de tubes en puissance pour peu qu'ils aient été proposés par un groupe officiant habituellement dans le domaine du Hard FM musclé, mais est-ce bien ce qu'un amateur de Saxon attend de ce groupe ? La réponse est non et c'est bien ce qui handicapera les ventes de cet album malgré le succès relatif du mid-tempo "Broken Heroes" pourtant réussit.
L'ensemble reste pourtant majoritairement de qualité, même s'il est impossible de ne pas regretter que ces titres ne bénéficient pas d'une production adéquate rendant hommage à l'énergie et au dynamisme qu'ils ne réussissent pas à dégager dans leur intégralité. Avec ce "Innoncence Is No Excuse", Saxon s'enfonce donc dans une démarche dont les visées commerciales se font au dépend de compositions qui mériteraient bien mieux. Souhaitons à Byff et sa bande de prendre conscience du risque de la démarche et de revenir rapidement aux valeurs qui ont fait leur succès jusque là.