Victor Peraino, l'homme qui se cache derrière Victor Peraino's Kingdom Come, fut le claviériste de Arthur Brown dans les années 70. Trouvant sans doute dommage que son talent reste dans l'ombre du fondateur de Kingdom Come (le groupe des 70's, pas l'autre), Victor Peraino eu la bonne idée de sortir un projet solo en s'entourant de musiciens piochés à droite et à gauche comme c'était souvent le cas à l'époque dans cette frange du rock progressif. Alors que ce disque aurait pu (et du) être naturellement englouti par les sables sélectifs du temps (aidé en cela par une rupture de stock providentielle), cette année 2010 voit sortir la réédition de "No Man's Land".
Soyons clairs tout de suite: je vous déconseille énergiquement cet album. J'irais même jusqu'à dire: fuyez-le. Si je dis ça, c'est d'une part pour éviter aux plus pressés une pénible lecture au dénouement inévitable, mais aussi pour qu'il n'y ait pas méprise sur toutes les nuances que je pourrais apporter dans un instant au ratage qu'est ce disque. Regardez-moi bien dans les yeux: non, non, et non, aucun des éléments sympathiques que ma grande mansuétude est allée gratter ne justifie ne serait-ce qu'un début d'intérêt pour cette galette.
Ce disque réussit le challenge d'aligner un nombre et une variété de défauts à couper le souffle: production hideuse, instrumentistes à coté de la plaque, chanteur souvent faux, composition n'ayant aucun sens, sonorités crispantes... Même la pochette est touchée par cette gangrène de mauvais goût (alors que l'originale n'est pas mal).
Le principal problème est sans doute la production qui fait penser à une mauvaise démo. Sur des chansons potentiellement intéressantes, l'effet est d'autant plus flagrant: "Run Through Your Life" pourrait être sympathique sans un son de guitare aigrelet, une basse totalement écrasée, et un effet reverb insupportable sur la voix. Au rayon des fautes de goûts ajoutons les nombreux sons électroniques abscons (mention spéciale à l'intro de "Empire Of Steel", et à "Tru", ineptie asiatique sans intérêt), et l'apparition d'un cuivre tout à fait hors de propos. Les lignes de chants sont également un élément très irrégulier: Victor Peraino possède une voix très banale, mais un chant qui peut être très expressif (voire théâtral). Malheureusement, c'est souvent ce premier aspect qui ressort, notamment à cause d'effets divers et avariés.
Malgré tout, il y a dans ce marasme quelques éclairs au cours desquels il faut bien reconnaitre que la musique du Victor Peraino's Kingdom Come devient très écoutable. Certaines interventions à la guitare ("Demon Of Love") ou au synthé ("Where Next") sont assez bien vues. Deux morceaux sortent également du lot: "Empire Of Steel" (une fois passé l'intro bruitiste), qui nous livre un rythmique bondissante et un break atmosphérique efficace, et le léger "Lady Of The Morning'" qui se développe progressivement via un joute synthé/guitare.
Ces bons moments, perdus au milieu de ce disque, ne suffisent pas - comme je le dis plus haut - à en faire un bon disque. L'impression dominante restera celle d'un album brouillon, mal composé et trop souvent mal joué, et surtout auquel la réédition n'apporte rien (les titres bonus, mis à part "Where Next", sont fades au possible).