Certains musiciens font preuve d’une imagination débordante pour dégoter un nom original pour leur groupe. Ken Ingwersen, guitariste de son état (et producteur, notamment du "Transistor" de TNT), a appelé le sien Kens Dojo puisqu’il est ceinture noire de Kung Fu et qu’un dojo est l’endroit où sont enseignés les arts martiaux. Pour le cas où vous souhaiteriez monter un combo, où vous vous prénommeriez Pierre et où vous aimeriez les frites, la voie vous est montrée pour labelliser le nom de votre formation, Pierre Friteuse, ça sonne effectivement méchamment métal. Cependant, m’est avis que même avec ce chatoyant patronyme vous n’attirerez pas d’amis aussi connus que ceux que notre cher Ken a accueilli dans son giron…Glenn Hughes et Ken Hensley ça vous parle ? Bon, puisque MW est la Bible, Père Lynott va vous rafraîchir la mémoire, le premier était le chanteur de Deep Purple et le second était le guitariste d’Uriah Heep. Amen.
Ken Ingwersen a traversé quelques groupes plus ou moins connus, plutôt moins que plus d’ailleurs, comme Street Legal, combo de Hard Mélodique, pour leur premier album datant de 2000 ("Thunderdome"), Speed ("One" en 1998) et Rags (deux albums en 1993 et 1995). En tant que guitariste émérite il aurait pu se laisser tenter par un album instrumental. Il a préféré comme il le laisse entendre proposer de vraies chansons interprétées par de bons chanteurs. Ainsi, hormis Glenn Hughes, quelques vocalistes se passent le micro tout au long de cet album doté toutefois, on ne se refait pas, de trois instrumentaux. Cette diversité vocale renforce l’intérêt de cet opus en créant une variation d’ambiances appréciables.
A tout seigneur tout honneur, le meilleur titre de cette production revient à Glenn Hughes qui transcende la magnifique Power Ballade "I Surrender", bourrée de guitares remplies de feeling. La médaille d’argent revient quant à elle au titre "Reincarnation". Ici, Chesney Hawkes, un chanteur de Pop anglais ayant tâté du cinéma ("Prince Vaillant" et "Buddy's Song" avec Roger Daltrey des Who – si si !), nous gratifie d’une belle performance dans une ambiance lounge-music perforée de superbes mélodies et de guitares rappelant le très connu "Bird Of Paradise" de Snowy White (ex-guitariste de Thin Lizzy). A "Set This Angel Free" la médaille de bronze. Ce très beau mid-tempo est interprété par Michael Eriksen, le frontman du groupe de Métal Prog Mélodique, Circus Maximus.
Quelques médailles du mérite pourront par ailleurs être distribuées. Celle du titre de Hard Mélodique à "Forever", celle de la ballade au bouleversant "Rain" qui nous rappelle l’Uriah Heep de "Salisbury", et celle du morceau Prog à "Keeping The Flame Alive" qui, grâce notamment à Nils K.Rue, vocaliste de Pagan’s Mind, nous replonge étonnamment dans le "Rage For Order" de Queensrÿche.
En ce qui concerne les trois instrumentaux, nous avons un "Momentos A Solas" hymnique, joué sur une guitare dont trois cordes appartiennent à Satriani et les trois autres à Axel Rudy Pell, un "El Recreo" qui n’aurait pas dépareillé sur les premiers albums d’UFO, et un "Soundcheck Bonanza" plus muclé, distordu, anarchique et moderne mais moins mélodieux. Ici, je garde mes médailles dans ma poche.
Vous savez tout, ou presque, sur cet opus un brin déséquilibré avec six titres très réussis, tous d’un genre différent, et cinq morceaux moins convaincants sans être toutefois à jeter au panier. Les six perles précitées valant à elles seules le déplacement de vos pavillons auriculaires vers vos écouteurs. Il est conseillé de vous intéresser à cette petite galette, qui ne paye pas de mine de prime abord, malgré sa pochette plutôt attrayante, mais qui se révèle rapidement être une performance très honorable de Hard Rock Mélodique.