"Resistor" est né en 2005 de la réunion de Steve Unruh, multi-instrumentiste ayant déjà à son actif plusieurs albums de prog-folk, et de Rob Winslow, ingénieur en électronique de profession et bassiste amateur dans divers groupes. Les deux amis répètent ensemble plusieurs mois sur leurs heures de repas avant d'apprendre qu'un électricien de maintenance de leur société est un excellent batteur. Barry Farrands, qui a laissé les baguettes de côté depuis quelques années, est enthousiaste à l'idée de rejouer de son instrument et le trio continue ainsi de répéter pendant les pauses déjeuner pendant une année. Steve Unruh commence à composer quelques titres pour le groupe qui se met à la recherche d'un pianiste pour compléter le line-up et rencontre Fran Turner … un guitariste tout juste embauché par leur entreprise et qui leur fait écouter une copie de son album, "Desert Voyage". "Resistor" est né.
D'après Steve Unruh, "Resistor" (résistance électrique en français) s'est naturellement imposé comme nom du groupe, puisque celui-ci était constitué de trois ingénieurs en électronique et d'un électricien ! Cette manière de ne pas trop se prendre au sérieux se retrouve tout au long de "Rise", deuxième opus du groupe, un premier disque appelé sobrement "Resistor" ayant vu le jour en 2008. L'humour, décidément maître mot de ce disque, se retrouve aussi sur la pochette, où le groupe nous prévient qu'il s'agit d'un double album enregistré sur un seul CD. Le premier disque comprend 5 titres alors que le second est constitué d'une longue suite de près de 40 minutes, découpée en 10 mouvements. Les deux disque sont séparés par le court "Changing Sides", 30 secondes de blanc et de parasites simulant probablement le temps qu'il faut virtuellement pour changer la face d'un vinyl sur une platine. Vraiment beaucoup d'humour, les gars.
Mais attention ! Avec "Resistor", recul et humour ne signifient pas manque de qualité ou amateurisme, loin de là. "Rise" est un disque rempli de trouvailles, d'inventivité, d'une grande diversité, à l'interprétation sans faille. Chaque musicien trouve sa place sans qu'aucun n'écrase l'autre, le tout dans une parfaite osmose. La voix de Steve Unruh est très agréable, capable de véhiculer douceur et mélancolie aussi bien qu'amusement et ironie. Les compositions sont toutes très intéressantes, n'engendrant aucune lassitude. Pas de ventre mou à cet album pourtant long (près de 80 minutes au compteur). Cela est probablement dû à la grande palette sonore que "Resistor" propose : "The Secret Of The Open Sky", rock alternant intimisme et lyrisme, "Spaceghetti", désopilante parodie des musiques de western spaghetti où l'on se prend à imaginer un Terence Hill partir au galop, son grand manteau crème au vent, "Ether", rappelant irrésistiblement "Astronomy Domine" de "Pink Floyd" ou encore le long "Mimosa", très ambiance Canterbury au début et à la fin, mais coupé en son milieu d'un thème plus haché et inquiétant.
La longue suite "The Land Of No Groove" est un vrai kaléidoscope. C'est intelligent, bien fait, intrigant, démonstratif, drôle, varié, jamais ennuyeux ni artificiel. Le chant de Steve Unruh rappelle souvent celui de Ian Anderson (Ian, pas Jon !), et l'ironie est de plus en plus sensible au fil du morceau, arrivant à son paroxysme sur "Off To Sea" et "Sea Monster Battle". Les chœurs de marins russes en goguette sur "Off To Sea" sont particulièrement réjouissants. Par ailleurs, "Rise" n'est pas en manque de références musicales. Ce disque ressemble à certains films comiques où, derrière l'humour décalé, le réalisateur s'amuse à parodier des chefs d'œuvre du 7ème art, en autant de clins d'œil au spectateur pour tester son érudition cinématographique. Comme ceux-ci, "Rise" renvoie à des artistes aussi divers que King Crimson, Ennio Morricone, Keane, Pink Floyd, Caravan, Fish, Kansas, Jethro Tull, Michel Polnareff, Peter Gabriel, … La liste n'est certainement pas exhaustive et nous vous laissons vous amuser à retrouver au fil de vos écoutes ces diverses références, et bien d'autres encore. Nous parlons bien de "références", et non d'influences, car il ne saurait être question d'un quelconque plagiat. Tout cela est saupoudré par petites touches et complètement intégré à une musique originale et personnelle qui appartient bien à "Resistor".
"Rise" est un disque riche et varié qui sait captiver l'intérêt de ses auditeurs de bout en bout. Son écoute distille une bonne humeur sous-jacente qui vous laisse béat et serein. Même si vous êtes naturellement attirés par des musiques plus mélancoliques, ne commettez pas l'erreur de passer à côté de ce disque. Son écoute ne peut que vous apporter du plaisir.