Dans le circuit depuis déjà plus de 15 ans, Melechesh est pourtant relativement inconnu hors des sphères extrêmes, et voilà déjà plusieurs albums que l'on se demande bien pourquoi ! En effet, leur précédent opus, Emissaries (sorti en 2007), faisait déjà état de qualités remarquables : sens épique prononcé, compositions originales et débordant d'énergie, production en constant progrès, et bien entendu, cette ambiance singulière entre thrash, black/death et musique orientale. Cependant, il faudra certainement une merveille de la trempe de The Epigenesis pour les faire enfin sortir de cet anonymat, tout relatif qu'il soit.
Cela saute aux yeux dès les premières minutes : avec cet album, Melechesh entend bien jouer dans la cour des grands, et pour un peu, on jurerait la partie d'ores et déjà remportée ! Sur des bases black métal affirmées ("Grand Gathas Of Baal Sin"), le quartet développe une musique qui est bien plus que la somme de ses influences, bien davantage qu'un simple assemblage précaire de genres, de styles, d'idées. Tantôt versé dans les arabesques arabisantes de passages envoûtants (l'instrumental "When Halos Of Candles Collide", qui rappellera évidemment Nile, ou encore le riff fabuleux du morceau-titre), tantôt dans un thrash aussi heavy que progressif ("Sacred Geometry"), The Epigenesis exhibe une richesse des plus admirables, tout en maintenant une cohésion qui l'est tout autant, une unité en outre somptueusement mise en valeur par une production des grands jours. Réfléchie, cette musique est complétée par des textes qui le sont tout autant, issus de la mythologie sumérienne (la première des grandes civilisation antiques) où le symbolisme joue une grande part. La pochette elle-même en est un exemple explicite, entre proportions du nombre d'or et arbre des Séfirotes, entre serpent et dieux mésopotamiens... Pour faire court, voici un disque intelligent, ce qui n'est finalement pas si habituel que ça.
Malgré cette avalanche de compliments, tout n'est pourtant pas idyllique ici. Premier et principal défaut du disque, un rythme malmené par une tracklist peu judicieuse. Le titre instrumental qui figure au beau milieu de l'album rompt une dynamique impressionnante, et il en va de même pour certaines parties étirées pour pas grand chose ; les morceaux longs qui figurent au programme auraient peut-être pu ne pas l'être dans de telles proportions, et les morceaux courts se voir rallongés un poil, de façon à conserver un peu d'inertie... Nous éviterons également de nous prononcer sur la pertinence de certains riffs répétés sans que cela ne contribue réellement à la progression rythmique des chansons. On sent le groupe fier de ses riffs, et il y a de quoi ("Grand Gathas Of Baal Sin", ou mieux encore, l'énorme break central de "The Magickan And The Drones"), mais un peu plus de variété n'aurait pas été de refus.
Hormis ces quelques considérations (il faut bien pinailler un peu !), ne vous y trompez pas, The Epigenesis est une tuerie à ne pas manquer, un disque extraordinaire. Dans la droite lignée de son prédécesseur, il apporte de nouvelles choses, essaie, et parvient finalement à surprendre, tout en apposant au fer rouge la marque de Melechesh dans le grand livre du métal. La seule et unique raison qui fait qu'il ne reçoit pas aujourd'hui la note maximale est tout simplement que l'on pressent toujours chez ce groupe un énorme potentiel d'évolution... Gageons que le prochain album sera encore meilleur, et qu'il sera alors temps de hurler au chef-d'œuvre ! Une des meilleures sorties de l'année dans le genre, à ne pas manquer !