Au milieu des rééditions et autres réenregistrements en tous genres entamés lors de sa (heureusement brêve) course contre la mort il y a de cela trois années, Erik de Beer nous propose en cette année 2010 un nouvel album de Life Line Project, Distorted Memories, écrit, composé et interprété dans la droite ligne de The Finnishing Touch.
Pour mémoire, ce dernier voyait le LLP se constituer en véritable groupe et amorcer une évolution de style évidente instaurant une fusion entre les traditionnels éléments symphoniques 70's si chers à Erik de Beer, et des genres plus affirmés comme le jazz, le folklore ou encore quelques fulgurances électriques. Poursuivant cette évolution, Distorted Memories reprend tous ces ingrédients, mais en améliorant grandement la recette et en y apportant à nouveau quelques touches de fraîcheur.
Première nouveauté, et non des moindres, le maestro a laissé la composition de deux pistes au talentueux Jason Eekhout, et la patte du jeune homme donne un véritable coup de fouet à ces compositions, notamment dans le jouissif Caelum Aurum, au sujet duquel le duo (duel ?) qu'il compose avec la encore plus jeune violoniste Josine Fraaij mérite assurément le détour. Il semble également que les tonalités carrément rock (P.C. Left is Right) lui doivent un petit quelque chose.
Justement, puisque nous l'évoquons, comment passer sous silence la performance de cette jeune virtuose dont le talent n'a d'égal que le jeune âge (1). Erik de Beer profite ainsi de ses capacités pour intégrer quelques notes de Vivaldi dans ses compositions les plus symphoniques (Distorted Memories).
Aux côtés de ces deux jeunes talents, nous retrouvons bien évidemment toute la palette sonore entendue dans les précédents albums de Life Line Project : claviers 70's, guitare tantôt acoustique tantôt électrique, voire même électrisante, basse inventive accompagnée de cette batterie aux sonorités typiques toujours un peu sèches, instruments classiques (hautbois et flûte), venant souligner les thèmes les plus mélancoliques, le tout se mélangeant de manière harmonieuse, à un degré largement supérieur aux autres réalisations du groupe, Erik de Beer parvenant à mettre en symbiose parfaite ces différentes inspirations.
Et comme il n'est pas nécessaire d'expliquer à notre artiste comment composer des plages dans lesquelles les thèmes tour à tour se dévoilent, se mêlent et se rejoignent, l'aboutissement de sa démarche se retrouve synthétisé de façon fantastique sur les deux plages épiques de l'album : Life Line Suite 2010 tout d'abord, qui remet au goût du jour le premier titre enregistré par LLP, et puis surtout le splendide The Final Word, rehaussé par les parties vocales de Marushka Kartosonto au service d'un texte poignant.
Pour résumer, Distorted Memories pourrait se définir comme la fusion (plus que) réussie du symphonisme de The King, et de la fusion jazz-prog de The Finnishing Touch. Vous trouverez sans doute que cette chronique est truffée de superlatifs, mais pour parodier une marque célèbre, je ne pourrai qu'ajouter que c'est parce que cet album le vaut bien, et l'abnégation mise par Erik de Beer dans la production, album après album, d'une musique intelligente qui parle au centre des émotions, mérite vraiment que l'on s'y intéresse.