Nouveau venu d'Allemagne, InVertigo (à ne pas confondre avec ses homonymes australien et américain) nous livre après trois ans d'existence son premier album.
Avant même de se lancer dans une première écoute, un simple coup d'œil sur la durée des six titres repris sur l'album attire l'attention de tout amateur de rock progressif un tant soit peu averti : aucun morceau sous les 7 minutes, et même un titre long de 12 minutes et quelques. Cela fleure bon les développements et digressions musicales. Rapide détour par le line-up pour constater que, si celui-ci est archi-classique (chant, guitare, basse, claviers, batterie), le chanteur est également crédité du piano. Deux claviéristes, n'est-ce pas la promesse d'une touche symphonique ? Enfin, quand on sait que le groupe se revendique de modèles tels Genesis, Yes, Spock's Beard, Marillion, The Flower Kings ou encore Porcupine Tree, c'est le cœur plein d'espoir qu'on se décide à glisser le CD dans le lecteur, en souhaitant que le ramage corresponde au plumage.
Les premières notes viennent immédiatement titiller de façon fort agréable nos conduits auditifs : une introduction en douceur, une atmosphère vaguement inquiétante, quelques voix murmurées, la basse et la percussion qui entrent discrètement en scène … l'accroche est réussie. A partir de cet instant, InVertigo va dérouler durant plus de cinquante minutes un rock progressif de bonne facture, le plus souvent enlevé, avec de fréquents changements de rythme, évitant ainsi tout sentiment d'ennui ou de lassitude sans pour autant déstabiliser l'auditeur.
Les morceaux plutôt longs permettent au groupe de développer des textures musicales variées. Le mélange des instruments est harmonieux, les claviers (piano, orgues en tout genre, synthés) sont très présents, mais laissent régulièrement la place à des solos de guitares qui, sans être ébouriffants, s'écoutent avec plaisir. La batterie sait s'imposer sans noyer l'ensemble sous un flot de décibels importuns, et la basse est bien en relief sur la plupart des titres.
Seul bémol à ce concert de louanges, le chant n'affiche pas la même qualité. Sans être désagréable, loin de là, il est à mon avis inégal, parfois très plaisant ("Vertigo"), parfois limite en puissance et tenue de note ("The Night"), sans vraiment rien d'alarmant. Le timbre fait beaucoup penser au chanteur d'Overhead, Alex Keskitalo, capable lui aussi du meilleur comme du pire, ou parfois à celui de Roine Stolt, qui n'est pas le meilleur chanteur de la terre. Enfin les quelques chœurs épars ici et là manquent un peu de vigueur, en devenant presque timorés. Néanmoins, si le chant n'est pas transcendant, il a le bon goût de ne pas altérer l'intérêt que la diversité des compositions n'a pu manquer d'éveiller. Les atmosphères travaillées des différents titres s'écoutent au fil du temps avec un plaisir affirmé. Pas de lassitude mais pas de frisson non plus...
Un premier album intéressant d'un groupe qui semble disposer d'un riche potentiel. Si "Take Your Time" aux fausses allures country ne m'a pas vraiment convaincu, tous les autres titres méritent que vous leur consacriez une attention bienveillante, notamment l'excellent "Night On Broadway", plus Overhead que jamais. Un groupe qui s'avère prometteur.