Au moment où vous lirez ces quelques lignes, sachez que Hopeless aura cessé d'exister, puisqu'il s'est sabordé il y a quelques semaines à peine. Mais finalement quoi de plus normal pour un escadron de la mort ayant fait du suicide et de la dépression la matrice de son inspiration tant textuelle que musicale ?
Elements constitue donc l’ultime clou servant à sceller son cercueil. Etouffées par un halo brumeux qui leur confère un aspect fantomatique et lointain, ces six lancinantes (est-il besoin de le préciser ?) complaintes dérivent d’une manière monotone sinon paresseuse dans le caveau d’un Black Doom Metal funéraire. Elles forment l’écrin propice aux ruminations sinistres de Luciferian, l’unique membre du projet qui vomit toute sa haine et son désespoir à grands coups de hurlements écorchés tellement inaudibles qu‘ils contribuent à donner à ces titres un caractère instrumental prononcé, de guitares minimalistes pleurant des hectolitres de désolation et de claviers morbides.
Dire que c’est lent tient de l’euphémisme mais ça fait partie du charme. Car charme (masochiste) il y a. Hopeless a beau braconner sur les terres depuis bien longtemps lessivées par les Xasthur, Forgotten Tomb, Katatonia (celui des débuts) et autre Striborg et sans atteindre la puissance mortifère de son compatriote Ars Diavoli, on finit encore une fois par être touché, envoûté même, par ces marches funèbres répétitives suintant un sens de la mélancolie suicidaire pourtant déjà mille fois entendue.
De fait, dans le genre, et bien que vierge de surprises, Elements est une solide corde pour se pendre, dont on a du mal à imaginer, eu égard à sa charbonneuse noirceur, qu’elle est originaire d’un pays aussi ensoleillé que l’Espagne. "My Razor… My Crown" ou "Swallowing The Filth Of Life" sont des perles douloureuses superbes, des concentrés de souffrance qui confirment que Hopeless s’était imposé en l’espace de deux ans comme un pourvoyeur en spleen tout à fait recommandable car capable de régurgiter sa tristesse avec une désespérée et sinistre beauté. Dommage vraiment que Elements soit son testament…