Dans la famille super groupe (qui refuse l’appellation), je demande Black Country Communion ! Bonne pioche ! Très bonne même ! Il faut dire qu’avec une main pareille, on frôle le jackpot ! Cette association d’un grand bluesman blanc et d’un ex-pionnier du Rock à l’anglaise recrée cette ambiance unique à l’origine de l’explosion du Rock Dur des Early 70’s. Voilà en tout cas une explication toute personnelle à la grande fraîcheur et à la richesse harmonique et mélodique qui se dégage de cet album.
Inutile de présenter Glenn Hughes, chanteur et bassiste entré dans la légende, ni Jason Bonham, fils de qui vous savez, batteur du grand Led Zep. Quant à l’homme à la guitare, il est ni plus ni moins que la nouvelle sensation Blues mondiale : Joe Bonamassa. Le quatrième homme est un claviériste de génie, tortureur de clavier diablement efficace, M. Derek Sherinian himself, qui il faut bien l’avouer se la joue très discret ici, doublant surtout les riffs pour maintenir l’ambiance en laissant à Joe une plus large place.
Et ce groupe improbable au feeling unique nous sert là un Rock très British, qui fleure bon le gros riff, la rythmique solide, l’urgence et la folie créatrice des premiers Purple, Rainbow, Sabbath, Cream et Led Zep. Hughes, homme au charisme impressionnant, chante beaucoup (plus que son guitariste) et fort (finie la Soul, il Rock !), compose la majorité des titres et étale sa grosse basse addictive sur toute la galette. Cela se ressent sur des titres comme "The Great Divide", mid-tempo au riff excellent et qui convainc sur la longueur, et "Down Again", un titre très Early 70’s au solo Bluesy.
Cette énorme prestation associée au génie et à l’univers propre des autres musiciens crée un bel équilibre, au service d’une spontanéité et d’une alchimie trop rare de nos jours. Un titre comme "Beggarman" par exemple, ou "No Time" (Bonamassa s’y exprime pleinement et le passage symphonique massif fait merveille) est tout bonnement contagieux et réellement jouissif. Le genre de titre que l’on se repasse de suite, rien que pour le plaisir !
Dans le désordre, cette petite pépite recèle un opener très "In Your Face" (dixit Hughes). Tout débute par une basse véloce et ronflante, appuyée rapidement par une guitare frénétique et un refrain a capella du meilleur effet. Le premier solo de Bonamassa annonce la couleur, il va y avoir du lourd ! "One Last Soul" est un single plus facile d’accès et contagieux malgré ses couplets pris à contre-pieds, et le rapide "Beggarman" voit Bonamassa faire chauffer sa guitare pour lancer un Blues Rock enlevé, teinté de Soul, représentant l’alchimie parfaite des genres.
Voici venir ensuite le plus beau joyau de la couronne : "Song Of Yesterday", coécrite par Kevin Shirley lui-même, est un titre unique, qui renvoie à l’époque bénie où Clapton faisait vibrer les foules, où Blackmore et Page nous ravissaient avec des "Stairway To Heaven" ou des "Mistreated". Débutant par une douce flûte, secondée par un orchestre (sans jamais sentir le plagiat), la guitare et la voix de Joe vous filent le frisson. Appuyé sur la suite de bons gros riffs et montant en puissance sur la fin, ce titre est déjà un Monument du Patrimoine Rock. Simplement magnifique !
Le dérangeant "Medusa", seule reprise de l’album, rappelle les grandes heures de Trapeze avec sa guitare psyché et son riff lourd (Bonham y est très impressionnant !). La fin de l’album est toute aussi intéressante avec un "Revolution In Me" à la démarche pachydermique, faisant en son texte, et par la bouche de Bonamassa, hommage aux grandes heures du Hard Rock, et sur lequel se retrouve enfin l’influence de Sherinian sur la partie instrumentale. "Sista Jane", à deux voix, devrait plaire aux fans d’AC/DC, alors que les longs "Stand" à la basse délicieuse (le meilleur moment de cette fin d’album, sans le moindre doute), et "Too Late For The Sun" laissent une part belle à la jam languissante.
Voilà un album qui se laisse écouter sans temps morts, et souvent garni de superbes illuminations. Chickenfoot n’a qu’à bien se tenir, le vrai Classic Rock se trouve dans les Black Country !
« I Am A Messanger, And This Is My Prophecy… I’m Going Back, To The Black Country! »
NB : un DVD bonus sur l’Edition Collector contient un clip studio, deux titres live, dont le "Mistreated" de Purple, ainsi qu’une interview sympathique sur la genèse du groupe.